A petits changements, grand malaise

Un Premier ministre hospitalisé pour surmenage, un gouvernement à peine nommé déjà contesté par des manifestants toujours en colère. Le remaniement promis pouvait difficilement être plus mal parti.

Publié le 28 juillet 2011 Lecture : 2 minutes.

« Essam Charaf n’était pas la bonne personne pour diriger cette période de transition. C’est un technocrate, pas un homme politique », assène Saïd Sadek, professeur de sciences politiques et sociales à l’Université américaine du Caire. Pourtant, depuis qu’il a été choisi par la place Al-Tahrir début mars, le Premier ministre se donne corps et âme à sa fonction. À tel point qu’il a fini à l’hôpital, victime d’une chute de tension.

Le 11 juillet, le Premier ministre promettait un gouvernement « révolutionnaire ». Le remaniement tant attendu a eu lieu après bien des reports et, sur les vingt-sept ministres du premier gouvernement Charaf, seuls douze ont conservé leur portefeuille. « L’ancien gouvernement ne reflétait pas la diversité de la vie politique. Le nouveau est composé de technocrates et de spécialistes qui vont se concentrer sur la réforme de leur ministère », explique Ahmed Nagui Amha, chercheur au Centre d’études politiques et stratégiques Al-Ahram.

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L’entrée de certaines personnalités dans la nouvelle équipe a été favorablement accueillie par les manifestants. « Les révolutionnaires du monde médical approuvent le choix du ministre de la Santé. », affirme Salma Saïd, une jeune ­manifestante d’Al-Tahrir. Cependant, le remaniement est loin de faire l’unanimité.

Armée et dépendance

Si le ministre de la Production militaire et celui des Antiquités, jugés trop proches de Moubarak, ont été remerciés, plusieurs de leurs homologues jugés incompétents par la foule ont été maintenus à leur poste. C’est le cas de Mansour el-Essawy, à l’Intérieur, dont le départ, réclamé par les manifestants, a été refusé par le Conseil suprême des forces armées. Ou celui de la Justice, Mohamed al-Guindi, à qui l’on reproche la lenteur des procédures judiciaires engagées contre les caciques de l’ancien régime.

Les fonctionnaires du ministère de l’Énergie et de l’Électricité ont, quant à eux, fait circuler une pétition pour demander la démission de leur ministre, qui a survécu au remaniement. Sans compter que certains nouveaux arrivants ont déjà entamé leur cote de popularité, comme le ministre des Finances, Hazem el-Beblawi, qui a fait savoir qu’aucun changement ne serait apporté au budget de l’État, imposé par l’armée.

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Les manifestants appellent le gouvernement à définir ses priorités et à prouver son indépendance. « Composé de révolutionnaires ou pas, il n’a pas de prérogatives. Il est paralysé par le Conseil suprême des forces armées », explique Salma Saïd. Même constat pour Saïd Sadek, qui estime que « l’ancien gouvernement a échoué à cause des interférences du Conseil. On ne sait même pas quels sont les pouvoirs du Premier ministre ».

Le programme de la nouvelle équipe de transition reste, ainsi que le souligne Ahmed Nagui Amha, « d’assurer la sécurité et de remettre sur pied l’économie égyptienne ». Mais, surtout, s’il veut répondre aux revendications de changement et être crédible, à défaut d’être légitime, il devra s’affranchir de sa dépendance à l’armée. 

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