Tchad : « La colère et l’angoisse » des victimes du régime Habré
Lors d’une réunion à N’Djamena, un ami de Clément Abaifouta, le président de l’association des victimes, reçoit un sms. « Habré arrive. » Nous sommes le jeudi 7 juillet. La lettre de Wade est sur le bureau de Déby Itno, mais l’information n’est pas encore sortie. « J’ai eu un sentiment de colère et d’angoisse », explique celui qui a subi dans sa chair la cruauté du régime Habré. L’avocate des victimes, Jacqueline Moudeïna, exprime elle aussi sa « consternation ». Pour elle, pas de doute. Au mieux, en cas de procès, il sera bâclé. Au pire, l’accusé pourrait tomber sous les balles de l’un de ses anciens complices.
À Bruxelles, Reed Brody, l’avocat de l’ONG Human Rights Watch qui suit l’affaire depuis ses débuts, est mis au courant le vendredi 8 dans l’après-midi. Très surpris par une décision « qu’il ne comprend pas », il alerte les opinions publiques : « Habré est déjà condamné à mort par contumace, au Tchad. Sa sécurité n’est pas garantie. » Cela fonctionne. Le lendemain, il reçoit un coup de téléphone depuis Genève de la haut-commissaire de l’ONU aux droits de l’homme, Navi Pillay. Dimanche 10, les Nations unies se saisissent du dossier. « Le Sénégal [signataire de la convention contre la torture, NDLR] ne peut extrader une personne vers un pays où il y a des motifs sérieux de croire qu’elle serait en danger d’être soumise à la torture », affirme dans son communiqué l’avocate sud-africaine. À Dakar, Me Wade vacille.
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