Sud-Soudan : une fête gâchée ?

Alors que l’indépendance du Sud-Soudan est célébrée ce samedi 9 juillet, l’ambiance est tendue à Juba. Les violences persistantes et les retards pris dans la transition politique inquiètent les observateurs. Et la présence de Omar el-Béchir pourrait gâcher les festivités…

Célébrations organisées par le mouvement indépendantiste du sud-Soudan le 5 juillet à Juba. © AFP

Célébrations organisées par le mouvement indépendantiste du sud-Soudan le 5 juillet à Juba. © AFP

Publié le 9 juillet 2011 Lecture : 2 minutes.

À Juba, désormais la capitale du Sud-Soudan, les habitants paniqués ont fui le Nil toute la journée du 23 juin. La rumeur courait d’une tentative désespérée du gouvernement nord-soudanais pour empêcher la proclamation d’indépendance du 9 juillet : « Le fleuve a été empoisonné par Khartoum ! » L’anecdote en dit long sur le climat qui règne dans l’actuel 54e État africain, dont 99 % de la population avaient voté en janvier en faveur de l’indépendance. La sécurité est bien la préoccupation première des Sud-Soudanais, dont 1 400 ont trouvé une mort violente entre janvier et mai 2011, dans des heurts entre groupes ethniques, entre milices et armée régulière ou entre Nord et Sud.

La future entre les deux États connaît les plus importantes violences enregistrées ces derniers mois. Khartoum a pris par la force, le 21 mai, la province disputée d’Abyei, d’où ont fui quelque 100 000 personnes. Le Conseil de sécurité de l’ONU a approuvé le 27 juin l’envoi de 4 200 Casques bleus éthiopiens dans la zone. Mais pour Kwesi Sansculotte-Greenidge, de l’African Centre for the Constructive Resolution of Disputes (Afrique du Sud), « c’est toute la relation Nord-Sud qu’il faut protéger, pas seulement les points chauds frontaliers, qui ne sont qu’un symptôme ». Par exemple, les modalités de partage des infrastructures pétrolières ne sont pas fixées : Juba pourrait être obligé de payer un loyer à son voisin du nord pour ces équipements. En attendant qu’un accord soit trouvé, Khartoum envisage de lui en interdire l’utilisation – un handicap économique qui représenterait un sérieux facteur d’instabilité.

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Les violences entre milices ou groupes ethniques menacent quant à elles l’unité de la nouvelle nation. Par ambition personnelle ou, plus rarement, par réelle divergence idéologique, de nombreux généraux rebelles harcèlent à présent les troupes de l’armée sudiste régulière. Cette dernière est, de son côté, encore marquée par son fonctionnement de guérilla au cours des longues années de guerre civile avec le Nord. À l’image de l’État dans son ensemble, loin d’être prêt pour l’indépendance. Le projet de Constitution n’a pas encore été approuvé, tandis que des doutes subsistent sur le délai de création de la nouvelle monnaie.

"Au diable"

À l’approche du 9 juillet et alors que les retards s’accumulaient, le pouvoir politique était de plus en plus tendu. Aleu Ayang Aleu, président de la commission de la Sécurité publique de l’Assemblée législative sud-soudanaise, a ordonné le 18 juin aux journalistes qui l’interrogeaient sur la multiplication des entraves à l’exercice de leur profession de « fermer leur gueule » et d’« aller au diable ». Une dernière ombre plane sur les cérémonies d’indépendance : la venue d’Omar el-Béchir, président d’un Soudan uni désormais amputé. Invité par le gouvernement de Juba, il pourrait faire fuir aussi bien les Sud-Soudanais, pas encore prêts à pardonner le pouvoir nordiste, que les diplomates étrangers, gênés de s’afficher avec un homme poursuivi par la Cour pénale internationale… 

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