Algérie : l’ébullition sous contrôle grâce aux états généraux ?

Les états généraux de la société civile ont permis aux citoyens, via un exercice de démocratie participative sans précédent, de s’associer aux réformes politiques en cours d’élaboration. Une méthode qui, pour l’instant, a permis d’éviter que la marmite algérienne ne déborde.

Deux policiers devant le drapeau algérien. © Farouk Batiche/AFP

Deux policiers devant le drapeau algérien. © Farouk Batiche/AFP

Publié le 27 juin 2011 Lecture : 3 minutes.

Dans le cadre des « profondes réformes politiques » annoncées le 15 avril par le président Abdelaziz Bouteflika, des concertations tous azimuts sont menées à travers le pays. Les consultations politiques, qui se sont ouvertes le 21 mai, ont vu défiler 250 partis et personnalités venus soumettre à l’instance dirigée par Abdelkader Bensalah des propositions et des recommandations en vue d’une révision de la Constitution. Il y a eu ensuite la réunion de la tripartite (gouvernement, syndicats et patronat), qui a abordé, le 29 mai, le volet économique du processus en cours. Enfin, du 14 au 16 juin, c’était au tour de la cohésion sociale de faire l’objet d’une importante rencontre, au Palais des nations, au Club des pins, station balnéaire à l’ouest d’Alger.

Sous l’appellation d’états généraux de la société civile, cette conférence placée sous l’égide du Conseil national économique et social (Cnes), présidé par l’intellectuel Mohamed Seghir Babès, a réuni quelque 1 100 participants venus d’horizons divers : mouvements associatifs, organisations syndicales (agréées ou non) et patronales, mouvements étudiants et de la jeunesse, cercles de réflexion et sociétés savantes, espaces académiques, victimes du terrorisme et associations caritatives islamiques… Bref, un aréopage bigarré, au moment où le front social est agité de toutes parts.

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Diversité

Contrairement aux règles protocolaires, Abdelaziz Bouteflika, qui parraine ces états généraux, s’est abstenu d’adresser un discours lors de l’ouverture des travaux. Une inauguration marquée également par l’absence de tout représentant officiel du pouvoir. « C’est une volonté manifeste de ne pas donner d’orientation particulière au débat, explique Mohamed Seghir Babès. Le seul message qu’il m’a chargé de faire parvenir aux participants est la réaffirmation d’une parole totalement libre. » Et elle le fut. Cela sautait aux yeux dès la fin de la session inaugurale. Les débuts des travaux ont pris des allures de foire d’empoigne. La question du choix des modérateurs et des présidents de séance a été l’occasion de montrer le degré de vitalité d’une société civile que l’on disait amorphe, prompte à l’allégeance et soumise aux diktats du pouvoir. Après quelques heures de conciliabules, les choses sérieuses ont débuté.

Un espace d’écoute et un relais des attentes citoyennes.

Ces états généraux de la société civile ont constitué un espace d’écoute et servi de point de relais aux attentes citoyennes, ainsi qu’aux propositions et recommandations à l’adresse d’un pouvoir qui promet l’ouverture démocratique. Vaste programme ! Pour le mener à bien, les organisateurs ont réparti les travaux en cinq ateliers. L’inscription était libre, et les participants autorisés à passer d’un atelier à l’autre. Le premier était consacré aux partenaires sociaux appelés à réfléchir à un nouveau régime de croissance. Le deuxième portait sur la pérennité du système de protection sociale et de la solidarité nationale. Le troisième atelier s’est intéressé aux aspects de la démocratie participative, le quatrième à la jeunesse et le cinquième à l’organisation de la société civile et au renforcement de son rôle dans la cohésion sociale.

À l’issue de trois longues journées de débats au cours desquels les échanges furent le plus souvent vifs, contradictoires et à bien des égards instructifs, les états généraux se sont conclus par une recension de toutes les interventions, écrites ou non. Y figuraient les propositions émanant des différents ateliers mais aussi une charte de la société civile rédigée sous la supervision de l’universitaire Mustapha Cherif, qui a eu à diriger les travaux du cinquième atelier. La diversité qui a caractérisé les participants (des associations caritatives islamiques aux organisations féministes les plus engagées) a contribué à la réussite de ce grand raout de la société civile. Confidence d’un participant à l’issue des travaux : « La vigueur des échanges et la multiplication des prises de bec prouvent le bien-fondé de la démarche. » Une sorte d’ébullition contrôlée.

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Par Cherif Ouazani, envoyé spécial à Alger.

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