Agoa, dixième round
Le forum de l’African Growth and Opportunity Act, à Lusaka du 8 au 10 juin, dissipera-t-il les inquiétudes ? Ce dispositif américain en faveur des produits du continent s’achèvera en théorie en 2015.
Tout est mis en place pour que le dixième forum annuel de l’African Growth and Opportunity Act (Agoa), du nom de la loi américaine sur la croissance et les possibilités économiques en Afrique, soit à la hauteur de l’événement. Pour honorer une décennie de rencontres, 800 personnes sont attendues à Lusaka (Zambie), du 8 au 10 juin. Parmi elles, 300 businessmen américains. Ils feront le déplacement avec la secrétaire d’État Hillary Clinton et son adjoint aux Affaires africaines Johnnie Carson.
Bilan mitigé. L’Agoa, instaurée en 2000 par le président Bill Clinton, ouvre le marché américain à plus de 6 500 produits africains libérés de tous droits de douane, en contrepartie de garanties de la part des États – une quarantaine aujourd’hui – en matière de respect des droits de l’homme et de bonne gouvernance. Ce coup de pouce de l’Oncle Sam devait contribuer au décollage de l’économie du continent.
Après dix ans, le bilan est mitigé. Certes, les échanges commerciaux ont quasiment triplé en dix ans. Toutefois, le flux est surtout à sens unique, permettant aux États-Unis de diversifier et de sécuriser leurs approvisionnements énergétiques. Les hydrocarbures vampirisent plus de 80 % des importations américaines. Entre 2009 et 2010, elles ont bondi de 40 %. Et ce n’est pas un hasard si le Nigeria et l’Angola sont, de loin, les deux premiers partenaires des États-Unis au sein de l’Agoa. En comparaison, les exportations africaines hors pétrole (textile et habillement, minerais, produits agricoles) peinent à décoller, même si elles ont augmenté de 18 % en 2010. Moins de 200 produits sur un potentiel de 6 500 sont aujourd’hui vendus aux États-Unis.
Secteur emblématique, le textile témoigne de ces ratés. Entre 2000 et 2004, les exportations africaines ont doublé grâce à l’Agoa. Environ 300 000 emplois ont été créés dans une quinzaine de pays. Mais la fin des quotas à l’encontre des pays asiatiques, négociée en 2005 au sein de l’OMC, a entraîné la délocalisation de plus de 100 000 emplois d’Afrique vers l’Asie. Autre handicap : les subventions aux cotonniers américains, qui pénalisent les producteurs africains. Après une chute de 48 % en 2009, les exportations africaines de textile et d’habillement vers les États-Unis ont encore baissé de 20 % en 2010.
À Lusaka, les Africains chercheront d’abord à être rassurés. Reconduite à trois reprises, l’Agoa s’achève en théorie en 2015. Johnnie Carson a fait savoir que le dispositif serait prolongé jusqu’en 2022, mais seulement pour quelques produits. Et l’un de ses artisans, le député démocrate Jim McDermott, a déposé en 2009 un projet de loi pour étendre à tous les pays pauvres de la planète cette exonération des droits de douane. Très agressifs déjà, le Cambodge, le Vietnam ou le Bangladesh pourraient porter un coup fatal au textile africain.
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