Tunisie : Leïla, la Cruella de Carthage

Dans un livre à paraître, l’ancien majordome de Mme Ben Ali raconte ses vingt années passées auprès du couple présidentiel tunisien. Vénalité, férocité et drogue… On en a froid dans le dos.

L’ancienne première dame de Tunisie, Leïla Ben Ali-Trabelsi. © AFP

L’ancienne première dame de Tunisie, Leïla Ben Ali-Trabelsi. © AFP

Publié le 8 juin 2011 Lecture : 2 minutes.

Il y avait décidément quelque chose de pourri au royaume de Carthage. Si certains en doutaient encore, le récit de Lotfi Ben Chrouda achèverait de leur ôter toute illusion. Avec la complicité d’Isabelle Soares Boumalala, collaboratrice à l’hebdomadaire Paris Match, l’ancien majordome de Leïla Ben Ali raconte ses vingt années passées « dans l’ombre de la reine » et ce que fut le quotidien du couple présidentiel, entre pittoresque et sordide.

Native de la médina de Tunis, Leïla la midinette qui n’a pas fait d’études rêve d’un grand destin : « Je vais me marier avec un prince, un roi ou un président […], changer votre vie, vous acheter des maisons. Vous aurez des bonnes et des chauffeurs », répète-t-elle aux siens. Elle tiendra parole, et sa cupidité sera sans limites. Son mysticisme de pacotille aussi. Une cohorte de sorciers qu’elle fait venir du Maroc, du Sénégal ou du Mali fait la loi, bien plus que les ministres. « Tu vas égorger le caméléon, tremper ton doigt dans son sang et dessiner un cercle autour de la cheville du raïs », lui intime l’un d’eux. Subjuguée, Leïla s’exécute. N’a-t-elle pas constaté que, « depuis le début de ces rituels, la volonté du président s’amenuise un peu plus chaque jour ? » Prête à tout pour ne pas perdre son ascendant sur un époux volage en manque de descendant mâle, elle ment sur le sexe de l’enfant qu’elle porte pour se faire épouser, prend à son tour un amant, un certain Larbi Mehadoui, et abrite leurs ébats à La Marsa ou dans des palaces à l’étranger. Derrière une façade « amour, gloire et beauté », le couple présidentiel vit dans une ambiance volcanique. Un jour, écrit Ben Chrouda, « furieux [de ses infidélités], le raïs lui assène un coup de poing au visage et dégaine son pistolet en menaçant de la tuer ».

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Huile bouillante

Mais le président a bien du mal à résister à la volonté de celle qui, telle la méchante reine de Blanche Neige, apostrophe son miroir : « C’est qui, la déesse de la Tunisie ? C’est moi ! » Véritable Cruella d’Enfer, elle n’hésite pas à plonger les mains d’un cuisinier, peu rapide à son goût, dans de l’huile bouillante. « Avec Ali Seriati [ex-directeur de la sécurité présidentielle, NDLR] et sa famille [les Trabelsi, NDLR], c’est la terreur qu’elle va distiller et la corruption qu’elle va généraliser », explique Ben Chrouda. On pille jusqu’au patrimoine archéologique pendant que le sérail s’amuse, de soirées cocaïne en parties de poker au Club Elyssa, où l’on fait et défait les carrières.

Avant sa fuite, Ben Ali avait confié que Sidi Hmid Bannour lui était apparu en rêve : « Tu as déplacé mon tombeau pour construire ton palais, lui aurait dit le saint homme. Moi, je vais te déplacer au-delà des mers, et tu mourras en pays étranger. »

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