Télésud : chronique d’une instabilité
Sept mois après l’arrivée d’une nouvelle direction, la chaîne Télésud doit faire face à une restructuration. Un tiers des emplois sont menacés.
Depuis quelques semaines, l’ambiance à Télésud est délétère. Arrivés aux affaires en octobre dernier, Bernard Volker, directeur général, et Aurélien Delpeyroux, gérant de la chaîne généraliste consacrée aux pays du Sud, tentent de faire passer une douloureuse restructuration. L’objectif ? Redresser la chaîne parisienne empêtrée dans des difficultés financières.
Sur un effectif de trente salariés, près du tiers serait concerné par un plan de licenciement collectif pour des raisons économiques. Deux séparations à l’amiable ont déjà été signées et au moins huit autres salariés ont passé des entretiens de licenciement. Reste que, même si une liste a été constituée, les tergiversations de la direction sur les postes à supprimer font que « jusque-là, on ne sait vraiment pas qui reste et qui part », confie un journaliste de la chaîne.
Seule certitude, la direction est déterminée à réduire la masse salariale, qui représente plus de 60 % des charges fixes. Mais c’est compter sans le personnel qui dénonce déjà des vices de procédure : contrairement à ce qu’impose la loi, les délégués du personnel affirment ne pas avoir été consultés. Aucun document ne leur a été remis. Dans un courrier daté du 15 avril, adressé à Bernard Volker et à Aurélien Delpeyroux, et dont Jeune Afrique s’est procuré une copie, les deux délégués du personnel ont réclamé l’annulation de la procédure.
Dettes à effacer
En attendant, les nouveaux patrons de Télésud affirment que la chaîne vit au-dessus de ses moyens. « Quand nous sommes arrivés, il y avait quatre mois d’arriérés de salaires. La société, frappée par une interdiction bancaire, n’était en règle ni avec le Conseil supérieur de l’audiovisuel [CSA, NDLR], ni avec l’inspection du travail… », se défend Bernard Volker. Bien qu’elle ait été renflouée entre fin 2009 et début 2010 à hauteur de 2,5 millions d’euros par son actionnaire majoritaire, Éric Benquet, un Franco-Gabonais considéré par certains comme un prête-nom de Pascaline Bongo, Télésud n’est toujours pas parvenue à effacer la totalité de ses dettes. Début 2010, la chaîne était même à deux doigts de l’écran noir.
Aurélien Delpeyroux, le nouveau gérant, assure cependant que « d’ici à la fin juillet, grâce aux économies que nous réalisons, la dette de près de 700 000 euros que nous avons trouvée en arrivant sera entièrement remboursée ». Certaines sources soupçonnent le gérant de la chaîne d’être un proche du nouvel actionnaire majoritaire. La configuration du tour de table de Télésud a en effet changé selon le procès verbal d’une assemblée générale extraordinaire des associés qui s’est tenue le 24 mars et dont J.A. s’est procuré une copie. Désormais, le capital social du holding de Télésud, Wireless and Internet Afromedia (Wiam), qui s’élève à 20 200 euros (202 parts de 100 euros), est détenu à plus de 80 % par une société immatriculée au Luxembourg, dénommée Artnelux. Déclarée au Journal officiel du Grand-Duché de Luxembourg du 8 mai 2007, Artnelux a pour objet la prise de participation dans toutes sociétés opérant sur le marché de l’art. Patrick Rochas, un administrateur de sociétés et Maurice Houssa, un économiste, basés au Luxembourg, en sont les propriétaires. Éric Benquet, qui jusque-là était l’actionnaire principal de la chaîne, détient désormais moins de 20 % des parts.
Si le personnel reconnaît aux nouveaux patrons des efforts ayant permis de régulariser les salaires, il conteste cependant leur démarche qui consiste à licencier les petits salaires. « Nous ne comprenons pas, écrivent-ils, les choix de la direction qui, pendant qu’elle parle de réduction de coûts, achète au même moment des émissions à 15 000 euros par mois. » Défense de la direction : pendant longtemps, les programmes de la chaîne ont été tellement pauvres que l’audience en a souffert. À tel point que « Canal Afrique, le principal diffuseur, menace de dénoncer le contrat qui [les] lie », explique Bernard Volker.
De source interne, l’on prétend que la direction « préférerait avoir à payer des factures plutôt que de supporter des charges salariales ». Autrement dit, elle entend externaliser une bonne partie de la production…
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