Égypte : Amr Moussa en pole position

Fort de sa popularité et de sa stature internationale, l’ex-secrétaire général de la Ligue arabe nourrit des ambitions présidentielles.

Sur les rives du Lac de Côme, en Italie, le 3 septembre 2010. © AFP

Sur les rives du Lac de Côme, en Italie, le 3 septembre 2010. © AFP

Publié le 27 mai 2011 Lecture : 3 minutes.

Deux événements concomitants lui ont profité : l’expiration de son second mandat de secrétaire général de la Ligue arabe, en mars, et la vacance à la tête de l’État égyptien après la chute de Hosni Moubarak, le 11 février. En outre, sa rapide prise de position contre la répression des insurgés libyens par les forces de Kadhafi lui a valu d’engranger un important capital de sympathie dans son pays.

Diplomate de carrière, ancien ministre des Affaires étrangères (1991-2001), Amr Moussa, 74 ans, avait annoncé, dès le 27 février, qu’il ne briguerait pas un troisième mandat à la tête de la Ligue arabe et qu’il envisageait d’être candidat à l’élection présidentielle, qui devrait se tenir à la fin de l’année. Une annonce intervenue le lendemain de la proposition du gouvernement militaire provisoire d’amender la Constitution pour autoriser un plus grand nombre de candidatures et limiter à deux le nombre de mandats présidentiels. Les modifications proposées par la Commission de révision de la Constitution ont été approuvées par référendum le 19 mars. Désormais, tout Égyptien peut concourir pour la présidence. « Si Dieu le veut, je serai l’un d’eux », avait alors déclaré Moussa. Lequel, si l’on en croit les résultats d’un premier sondage, devance nettement Mohamed el-Baradei, ex-directeur de l’Agence internationale de l’énergie atomique (AIEA) et Prix Nobel de la paix, qui avait pris la tête de plusieurs manifestations pour la démocratie durant la révolution.

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Amr Moussa est dans la diplomatie depuis le début de sa carrière. Membre de la délégation égyptienne aux Nations unies en 1972, il dirige ensuite le département des organisations internationales au ministère des Affaires étrangères, au Caire. En 1983, il est nommé ambassadeur en Inde, avant de devenir, en 1990, représentant permanent de l’Égypte à l’ONU. Durant ses années à la tête de la diplomatie, ses prises de position propalestiniennes le rendent extrêmement populaire parmi les siens. Beaucoup verront d’ailleurs dans sa nomination à la Ligue arabe un moyen pour Moubarak d’éloigner un concurrent politique. À l’époque, le quotidien nassérien Al-Arabi avait annoncé la nouvelle en titrant : « Le choc ! »

Mais Amr Moussa profite de ses nouvelles fonctions pour renforcer sa stature sur les plans national et international, notamment en condamnant la politique américaine dans la région. En juin 2010, il est le premier responsable arabe à visiter Gaza depuis la prise de pouvoir du Hamas, en 2006. « La position de la Ligue arabe est claire, avait-il dit. Ce blocus, auquel nous faisons tous face, ici, doit être levé. » Cette fermeté lui permet de consolider sa popularité, les Égyptiens désapprouvant la politique régionale du régime Moubarak, jugée pro-israélienne. Amr Moussa a promptement soutenu les manifestants de 2011 et s’est rendu place Al-Tahrir le 11 février – un déplacement largement interprété comme un test de popularité. Il a été acclamé aux cris de : « On te veut comme président, on te veut comme président ! »

Réformateur modéré

Ce soutien n’est pourtant pas unanime. Selon Ahmed Maher, l’un des leaders de la Coalition des jeunes de la révolution, « il ne s’est jamais réellement engagé contre le régime. Il a toujours attendu que d’autres balisent l’espace politique et ne s’est exprimé ouvertement qu’une seule fois, dès lors qu’il était sûr que le risque était minime ». Il n’en reste pas moins que, dès l’élection présidentielle de 2005, un groupe avait lancé une pétition l’appelant à être candidat – une démarche souvent utilisée en Égypte pour sonder l’opinion.

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Amr Moussa semble aujourd’hui se positionner comme le lien entre l’ancien et le nouveau : un réformateur modéré à même de jeter un pont entre les forces conservatrices de l’ancien régime et une société égyptienne qui se modernise. Lorsqu’on lui a demandé si Hosni Moubarak devait être jugé (avant l’incarcération de ce dernier), il a répondu : « Pour quoi faire ? Nous verrons s’il y a des éléments contre lui. Mais, pour l’instant, il s’est retiré et devrait être traité comme un ancien président, avec tout le respect qui lui est dû. » Une attitude qui a irrité les détracteurs de Moussa. « Le problème avec Amr Moussa, a commenté Bahey Eddin Hassan, le directeur de l’Institut du Caire pour l’étude des droits de l’homme, c’est que, malgré sa popularité, c’est un fils du régime. »

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