Guinée-Bissau : contre les narcotrafiquants, Lucinda a craqué

Menacée de mort par les narcotrafiquants, Lucinda Gomes Barbosa Ahukarlé, la directrice de la police judiciaire, jette l’éponge.

Elle avait assuré de ne jamais céder. Mais la corruption qui gangrène le pays a eu raison d’elle. © Georges Gobet/AFP

Elle avait assuré de ne jamais céder. Mais la corruption qui gangrène le pays a eu raison d’elle. © Georges Gobet/AFP

Publié le 26 mai 2011 Lecture : 2 minutes.

En 2008, un an après sa nomination à la tête de la police judiciaire, Lucinda Barbosa Ahukarié assurait que jamais elle ne céderait. « Je n’ai pas peur car je crois en Dieu. Je suis déterminée à aller jusqu’au bout du combat contre la drogue. » Lorsqu’elle a tenu ces propos, elle avait déjà reçu des menaces de mort. Mais il faut croire que les narcotrafiquants ont été plus forts que sa foi : le 13 mai, elle a annoncé sa démission. Trop de menaces personnelles, pas assez de moyens…

« J’ai mis en place un système qui a commencé à porter ses fruits. C’est peut-être cela qui a dérangé ces réseaux et leurs complices locaux, explique-t-elle. Ils voulaient ma tête. » Le gouvernement assure, de son côté, qu’il ne s’agit pas d’une démission, mais d’une mutation programmée.

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Dans un pays qualifié par les diplomates américains de premier « narco-État » d’Afrique, considéré par l’Office des Nations unies contre la drogue et le crime (ONUDC) comme le maillon faible du continent en matière de lutte contre le trafic de stupéfiants, cette femme menue d’une quarantaine d’années semblait au départ ne pas faire le poids, surtout que ses moyens étaient dérisoires. En 2008, la PJ comptait une soixantaine de policiers en civil… et deux véhicules. « Quand ils arrêtent quelqu’un, ils doivent le conduire au commissariat en taxi », expliquait récemment Sandra Valle, conseillère interrégionale au sein de l’ONUDC.

Succès plombés

Pendant quatre ans pourtant, cette incorruptible donne du fil à retordre aux trafiquants. Avec le soutien de l’ONU, qui a installé un bureau à Bissau, et grâce à l’aide du Brésil, elle a étoffé et formé son équipe. Confrontée à l’armée et à l’administration – en décembre 2010, elle a fait arrêter dix-neuf agents du ministère de la Défense –, elle a aussi fait montre d’efficacité, mettant aux arrêts trafiquants colombiens et terroristes mauritaniens, et interceptant plusieurs avions chargés de cocaïne. Autant de succès plombés par la corruption qui gangrène le pays : les stocks de « blanche » mis sous scellés ont disparu, les hommes arrêtés ont été libérés…

Selon l’ONUDC, le trafic de drogue a malgré tout reculé en Guinée-Bissau ces dernières années. C’était trop beau pour durer…

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