Minorités ethniques : Pygmées blues au Gabon

Grâce à leur savoir et à leurs traditions séculaires, les peuples autochtones sont les mieux armés pour protéger les écosystèmes du bassin du Congo. Encore faut-il leur en donner l’opportunité.

Très peu de Pygmés vivent en milieu urbain. © AFP

Très peu de Pygmés vivent en milieu urbain. © AFP

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Publié le 1 juin 2011 Lecture : 2 minutes.

À la poursuite du Gabon vert
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À la poursuite du Gabon vert

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Au cœur des débats du Forum international sur les peuples autochtones d’Afrique centrale (Fipac) organisé en mars à Impfondo, au Congo-Brazzaville : la situation de ces communautés et leur rôle dans la protection de l’environnement, de plus en plus menacés. Les experts sont arrivés au même constat amer que les autochtones : ces derniers sont marginalisés, dans tous les pays où ils vivent.

Qu’ils soient Babongos, Barimbas, Baghamas, Bakouyis, Akoas, Bakoyas, Bakas, les Pygmées sont présents sur l’ensemble du territoire gabonais. Selon l’Association pour le développement de la communauté pygmée du Gabon, ils seraient environ 18 000, alors qu’un recensement publié cette année à la demande du patron des parcs nationaux, Lee White, évoque 7 000 individus.

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En nature

D’après Paulin Kialo, directeur de l’Observatoire sur les dynamiques sociales à Libreville et chercheur à l’Institut de recherches en sciences humaines (IRSH), rattaché au Centre national de la recherche scientifique et technologique (Cenarest), « la situation des autochtones est préoccupante ». Absence de documents d’état civil, manque d’accès aux centres de santé, à l’éducation… Certains Pygmées sédentarisés sont scolarisés, quelques-uns vont jusqu’en terminale, mais le taux d’échec scolaire demeure très élevé, constate Paulin Kialo. Très peu d’entre eux vivent en milieu urbain, et la plupart de ceux qui ont sauté le pas résident à Libreville, la seule ville où ils ne sont pas stigmatisés.

Sur le plan économique, la situation des autochtones est loin d’être plus reluisante. Ils continuent de travailler pour des Bantus (activités de chasse, de débroussaillage, de portage), qui continuent de les payer en nature, avec des boissons alcoolisées de mauvaise qualité ou des vêtements usagés.

Les rapports entre les autochtones pygmées et les autres Gabonais sont ambivalents. « Ils sont valorisés quand on a besoin de leurs services, notamment dans le domaine de la médecine traditionnelle ou de l’occultisme, mais, au quotidien, ils sont moqués, matraqués aussi bien physiquement que psychologiquement », explique Paulin Kialo. Beaucoup sombrent dans l’alcoolisme.Et on ne leur accorde pas plus de crédit ni de prérogatives en ce qui concerne la protection de la nature en général et de la forêt en particulier.

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Marginalisés

Un paradoxe, car il s’agit de leur habitat naturel, avec lequel ils sont réputés entretenir un rapport de respect et sur lequel ils possèdent un savoir incontesté. Mais en dépit des directives de la Banque mondiale, qui, depuis 2005, finance le Projet sectoriel forêt et environnement (PSFE), aucun rôle en la matière ne leur est reconnu officiellement, qu’il s’agisse de l’exploitation forestière ou des parcs nationaux.

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Paulin Kialo résume ainsi la situation : « Les autochtones subissent deux sortes de marginalisation. Celle de l’État, à travers l’attribution des permis forestiers tous azimuts, et celle des Bantus, qui ne leur reconnaissent pas de droits sur les terres. » Lorsque les exploitants forestiers les emploient, ils leur versent des salaires dérisoires. Le Gabon n’a en effet toujours pas signé la convention 169 de l’Organisation internationale du travail (OIT) relative aux droits des peuples tribaux, qui date pourtant de 1989.

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