Sénégal : des cimentiers à couteaux tirés

L’arrivée du nigérian Dangote pourrait perturber un secteur jusque-là tenu par la Sococim et les Ciments du Sahel. Seules solutions : exporter ou s’installer directement dans des pays de la sous-région.

Dangote a investi 381 millions d’euros pour sa cimenterie au Sénégal. © Dangote Group

Dangote a investi 381 millions d’euros pour sa cimenterie au Sénégal. © Dangote Group

Publié le 12 mai 2011 Lecture : 2 minutes.

BTP et infrastructures : des chantiers « africanesques »
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La Sococim et les Ciments du Sahel sont inquiets. Les deux cimentiers historiques du Sénégal devront bientôt compter avec un concurrent de taille, le géant nigérian Dangote, qui devrait commencer sa production locale de ciment d’ici à la fin de l’année, avec 2,5 millions de tonnes par an. « Au Sénégal, il n’y a pas de place pour un troisième acteur », estime sans ambages Michel Layousse, directeur général adjoint des Ciments du Sahel, qui produit annuellement 2,4 millions de tonnes de ciment.

Surproduction

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Du côté de la Sococim (2,4 millions de tonnes de ciment par an également), on trouve « perturbante la venue de Dangote sur un marché sénégalais déjà saturé ». « La croissance du marché sénégalais est de 4 % par an, ce qui est assez faible », ajoute Éric Holard, directeur général adjoint pour l’Afrique du groupe Vicat, à qui appartient la Sococim. Dangote, qui a investi 250 milliards de F CFA (381 millions d’euros) pour sa cimenterie basée dans la région de Thiès à Pout (Ouest), n’en a cure : le groupe nigérian consacrera 60 % de sa production au marché local, qu’il entend inonder en cassant les prix.

« Avec une troisième cimenterie, la Sococim et les Ciments du Sahel risquent d’atteindre une surproduction de 1 million à 2 millions de tonnes chacun entre 2012 et 2015 », anticipe Mamadou Dansokho, chercheur au Consortium pour la recherche économique et sociale (Cres), basé à Dakar. De fait, avec une consommation nationale de 2,4 millions de tonnes par an, les cimentiers sont déjà en surproduction. Le surplus est absorbé par la sous-région, mais les velléités d’exportation sont quelque peu freinées « par le manque d’infrastructures maritimes et les blocages au port », assure Michel Layousse.

Et pour ne rien arranger, le groupe nigérian entend lui aussi occuper ce créneau, en exportant « vers le Mali, la Gambie et la Mauritanie », selon Serigne Aramine Mbacké, directeur général de Dangote Industries Senegal. En outre, pour le professeur Dansokho, si l’exportation pourrait constituer une échappatoire pour Sococim et les Ciments du Sahel, ce ne serait en aucun cas une solution miracle : « Comment faire face au Nigeria et à l’Asie, où les coûts de production sont respectivement de 20 % et 40 % moins chers ? »

Contre-attaque

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Seule solution pour les entreprises sénégalaises attaquées sur leurs terres : installer des usines en Afrique de l’Ouest. Et il faut aller vite : au Mali, l’indien West African Cement (Wacem) produira bientôt 1 million de tonnes de ciment, pour une demande de 1,7 million. Si la Sococim a le projet d’investir à Bamako d’ici à deux ans, avec la construction d’un centre de broyage de ciment d’une capacité de 400 000 t, de son côté Michel Layousse regarde ailleurs : à partir de janvier 2013, les Ciments du Sahel seront prêts à produire au Bénin 2 millions de tonnes de ciment par an ; le groupe y a investi 220 millions d’euros. Une autre usine est prévue mi-2012 au Tchad, et une troisième mi-2013, « dans un autre pays non loin du Tchad ».

Reste que, en s’installant ailleurs sur le continent, les deux cimentiers historiques du Sénégal pourraient bien se retrouver confrontés, encore et toujours, à la même concurrence : en effet, le groupe nigérian a annoncé mi-avril la construction de plusieurs usines en Afrique (lire page 92), notamment au Cameroun… et bien sûr au Nigeria.

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