Côte d’Ivoire : Simone Gbagbo en territoire ennemi

Elle y a cru jusqu’au bout. Même lorsque la fin a paru inéluctable. Le 22 avril, l’ex-première dame ivoirienne a été envoyée à Odienné. Loin de ses partisans, loin de son mari.

Simone Gbagbo a été arrêtée en même temps que son mari, le 11 avril. © AFP

Simone Gbagbo a été arrêtée en même temps que son mari, le 11 avril. © AFP

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Publié le 3 mai 2011 Lecture : 2 minutes.

Elle a été transférée à l’aube du 22 avril dans une résidence surveillée d’Odienné, à 670 km au nord-ouest d’Abidjan, en plein pays malinké, à deux pas des frontières guinéenne et malienne, autant dire, pour elle, en territoire ennemi. Simone Gbagbo, née Ehivet, 62 ans, n’a pas cessé de prier ni de lire la Bible depuis son arrestation musclée par les forces d’Alassane Ouattara, comme étrangère au sort qui est désormais le sien. Pendant les jours et les nuits qui ont précédé l’assaut final, cette femme de fer régnait sur le petit peuple du bunker de Cocody, y compris sur son mari, Laurent Gbagbo, qu’elle contrôlait avec un cocktail hallucinant de mysticisme et de bellicisme. Dans l’attente des légions célestes qui, selon elle, n’allaient pas tarder à venir sauver les reclus, l’ex-première dame s’est opposée jusqu’au bout à toute négociation, qualifiant de « traîtres » – alors que son époux gardait les yeux baissés – les ministres Alcide Djédjé et Koné Katinan venus proposer une reddition honorable. Puis, lorsque la fin est apparue inéluctable, Simone a organisé une cérémonie crépusculaire au cours de laquelle ses petits-enfants ont dû jurer sur la Bible de venger leurs parents et aïeux. Depuis que le couple Gbagbo était « entré en résistance », voici quatre mois, à l’issue d’une défaite électorale dont elle reste largement responsable pour avoir imposé une campagne outrancièrement sectaire entre les deux tours de scrutin, Simone Gbagbo avait pris la main sur son mari. Un retour en force pour le pire, qui a fait une victime collatérale en la personne de Nady Bamba, la seconde épouse, réputée modérée, expulsée du premier cercle dès novembre 2010.

Il serait certes injuste de faire de cette fille de gendarme native de Grand-Bassam, universitaire et militante saisie par le vertige du pouvoir, l’unique bouc émissaire du naufrage de la maison Gbagbo. Mais il n’est pas exclu que derrière la volonté de l’ex-président de partir seul dans sa propre résidence surveillée de Korhogo se cache la conscience tardive d’avoir été – même si ce fut avec son consentement manipulé…

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