Le printemps meurtrier

MARWANE-BEN-YAHMED_2024

Publié le 2 mai 2011 Lecture : 2 minutes.

Le monde arabe se trouve à un moment crucial dans sa quête de changement. La fuite du Tunisien Ben Ali et la chute de l’Égyptien Moubarak ont galvanisé les populations d’autres nations en proie auxmêmes maux et tout aussi pressées d’en finir avec leurs propres despotes. Mais elles se heurtent à des dirigeants qui semblent prêts à tout pour s’accrocher à leur pouvoir vacillant.

En Libye, en Syrie, au Yémen, à Bahreïn, mais aussi, dans une moindre mesure, en Arabie saoudite, à Oman, en Jordanie, le clan des gouvernants honnis a tiré les leçons du sort réservé à deux de leurs pairs, pourtant réputés indétrônables. Si Ben Ali se morfond sur les terres austères d’Arabie, Moubarak et ses fils, eux, ont été placés en détention et devront répondre de leurs actes au cours d’un procès qui promet d’être retentissant. Suprême humiliation pour nos « zaïms », qui avaient déjà du mal à envisager de quitter le pouvoir, quand bien même on leur garantissait l’immunité.

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Après le temps des promesses, dont ils n’entendaient certainement pas être comptables, tous, désormais, adoptent la même stratégie: faire des concessions limitées dans un premier temps, puis, très vite, accuser d’obscures puissances étrangères ou Al-Qaïda d’être derrière les soulèvements avant de sortir l’artillerie lourde pour mener une répression d’un autre âge, aussi sanglante qu’aveugle. La communauté internationale a réagi, et c’est heureux, pour empêcher « Kaddafou » de se livrer à de meurtrières représailles. Mais elle a aussi détourné pudiquement le regard lorsque l’Arabie saoudite a envoyé ses chars au secours de son voisin bahreïni ou lorsque Bachar al-Assad ou Ali Abdallah Saleh matent dans le sang les aspirationsdémocratiques de leurs peuples…Une politique du deux poids, deux mesures flagrante, fonction des intérêts à défendre ou des écueils à éviter,mêmes’il apparaît délicat d’envoyer des bataillons sur une demi-douzaine de théâtres différents…

Mais les satrapes du désert ne sont pas les seuls à avoir tiré les leçons des premiers épisodes de cette guerrepour la démocratie et le changement. Avec l’intensification de la confrontation, les « insurgés », animés d’une irrépressible soif de liberté, ne faiblissent pas, quoi qu’il leur en coûte. Et n’exigent plus seulement le départ des raïs, mais aussi leur jugement pour les crimes de masse qu’ils sont en train de commettre…

Le sort du printemps arabe se joue sous nos yeux. La folie meurtrière de dirigeants prêts à sacrifier leurs concitoyens donne la détestable impression qu’il se trouve dans l’impasse. Mais le temps ne joue pas en leur faveur : l’émergence d’un nouveau monde arabe est désormais irréversible. Certains l’ont compris. Les autres finiront, tôt ou tard,comme Moubarak ou Ben Ali.

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