Dominique de Villepin : « Nous ne sommes pas en guerre avec la Libye ! »

L’ancien Premier ministre se félicite de l’intervention militaire française contre le régime de Kadhafi… mais plaide pour une solution politique rapide.

Dominique de Villepin. © Sipa

Dominique de Villepin. © Sipa

Publié le 20 avril 2011 Lecture : 2 minutes.

L’ancien Premier ministre (et ancien ministre des Affaires étrangères), qui ne cache pas son ambition d’« incarner un projet » lors de l’élection présidentielle de 2012, se fait du rôle de la France dans le monde une conception très gaullienne. L’actualité internationale lui fournit pourtant l’occasion de… ne pas être en total désaccord avec Nicolas Sarkozy.

Jeune Afrique : Le rôle joué par la France dans la crise libyenne vous paraît-il légitime ?

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Dominique de Villepin : La France a été à l’initiative sur le plan diplomatique. Quand il est apparu que les choses se dégradaient gravement sur le terrain, que les populations civiles étaient menacées, c’était son devoir de faire voter par le Conseil de sécurité des Nations unies la résolution 1973. Mais je souhaite que le cadre strict posé par cette résolution soit respecté. Nous ne sommes pas en guerre avec la Libye. L’objectif est d’obtenir un cessez-le-feu le plus rapidement possible pour qu’à cette intervention militaire puissent répondre des initiatives politiques et diplomatiques. En revanche, j’aurais souhaité que l’Otan, qui est une mécanique sous domination américaine, ne soit pas directement impliquée dans l’opération.

Avec qui négocier une solution politique ?

En période de crise, il faut s’efforcer de trouver les interlocuteurs les plus représentatifs. En Afghanistan, par exemple, l’Occident a commis l’erreur de s’enfermer dans un tête-à-tête avec des gens qui ne représentaient pas suffisamment les populations, qui n’avaient pas suffisamment à cœur de s’ouvrir à la diversité des idées, des ethnies et des religions. Ne commettons pas la même erreur en Libye. Dès lors qu’un dialogue s’est noué avec le Conseil national de transition, veillons à ce que celui-ci s’élargisse le plus possible.

Mohammed VI a-t-il raison de vou­loir faire évoluer la monarchie marocaine ?

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Sans aucun doute. Il a raison de vouloir avancer vers une monarchie constitutionnelle, de vouloir mieux reconnaître les droits de l’opposition et d’avoir un Premier ministre plus représentatif. Il me paraît lucide quant aux attentes de son pays. Les chefs d’État qui choisissent de se replier sur eux-mêmes et prétendent tout verrouiller ne prennent pas en compte le caractère global des aspirations à la dignité, à la justice et à la liberté qui traversent le monde arabe.

La France, justement, a-t-elle encore une politique arabe ?

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Je suis très attaché à une politique capable de parler à l’ensemble du monde arabo-musulman. J’ai regretté que, depuis quelques années, la France ne soit plus à l’initiative dans la recherche d’un règlement du conflit israélo-palestinien ; que, dans la crise iranienne, elle adopte une position plus à droite encore que celle des États-Unis. Sa voix se fait parfois moins entendre, son engagement perd de sa spécificité. C’est le cas, par exemple, en Afghanistan, où notre position s’est banalisée dans le concert occidental. C’est d’autant plus regrettable que les États-Unis sont actuellement en retrait et que l’Europe, même si elle reste le premier pourvoyeur d’aide à la Palestine, est absente.

L’arrivée d’Alain Juppé au Quai d’Orsay peut-elle permettre de redresser la barre ?

Alain Juppé a été ministre des Affaires étrangères entre 1993 et 1995 – j’étais d’ailleurs à l’époque son directeur de cabinet. Je crois qu’il a toute l’expérience pour pouvoir, peut-être, dans certaines circonstances, recadrer cette exigence diplomatique.


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