Côte d’Ivoire : cet Ouest qui sent la poudre

À première vue, c’est un eldorado. Mais à y regarder de plus près, on déchante. Rivalités ethniques et foncières, brigandage… La région ouest de la Côte d’Ivoire est un concentré de tous les maux dont souffre le pays.

Maison brûlée à Duékoué après les combats entre FRCI et miliciens pro-Gbagbo. © AFP

Maison brûlée à Duékoué après les combats entre FRCI et miliciens pro-Gbagbo. © AFP

Publié le 29 avril 2011 Lecture : 2 minutes.

Un interminable essaim de petites plantations de café et de cacao. Une forêt luxuriante peuplée d’essences de bois rares exportés par de vieux camions vaguement inquiétants. Des montagnes sacrées renfermant des gisements de fer encore inexploités. Quand on le regarde d’un strict point de vue économique, le « Far West » ivoirien est, sinon une bénédiction, du moins une belle promesse. C’est pourtant la partie du pays la plus douloureusement marquée par les éruptions de violence politique de ces dix dernières années, comme l’a rappelé la découverte macabre de plusieurs centaines de personnes sommairement assassinées dans la ville de Duékoué, après qu’elle est tombée aux mains des forces pro-Ouattara.

L’Ouest concentre à lui seul la quasi-totalité des défis auxquels la Côte d’Ivoire est confrontée. Se pose avant tout la question de la sécurité et des droits de l’homme. Depuis la fin 2002 et la création par la rébellion, dirigée par Guillaume Soro, d’un front occidental, cette partie du pays est devenue une poudrière. La querelle identitaire ivoirienne y atteint également son paroxysme. La compétition politique a exacerbé les tensions entre les ethnies, qu’elles soient « autochtones » ou « allochtones ». Le tout sur fond de concurrence foncière, dans un contexte d’agriculture extensive et de raréfaction des terres.

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« Droit au retour »

Déjà complexes dans leur essence, les problèmes de l’Ouest ivoirien ont été aggravés par les combats et les massacres de ces derniers mois. Comment récupérer les armes légères qui ont proliféré des deux côtés de la frontière avec le Liberia, où les deux camps ont des appuis solides puisant souvent leur source dans des solidarités familiales et ethniques vieilles de plusieurs siècles ? Comment rassurer les dizaines de milliers d’autochtones guérés qui ont fui en masse au Liberia ou se sont réfugiés dans des églises, et garantir leur « droit au retour » sans allumer à nouveau la mèche de la vengeance et des règlements de comptes ?

Comment le régime Ouattara réussira-t-il à arbitrer l’épineuse question foncière, dans la mesure où la loi stipule que seuls les Ivoiriens peuvent être propriétaires terriens et où les contrats de vente, de métayage ou de location villageois sont en général oraux, et dépendent donc de la volonté de vivre ensemble des différentes communautés ?

Coupeurs de route

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La réinsertion des jeunes qui, depuis neuf ans, sont enrôlés dans les milices des deux bords n’est pas le moindre des défis. Beaucoup d’entre eux ont grandi dans la guerre et ont vécu de la guerre. La région connaît déjà un phénomène effrayant, qui risque de prendre une ampleur inédite : celui des coupeurs de route. Ces ex-combattants armés dépouillent et vont parfois jusqu’à violer les passagers des cars brinquebalants qui desservent les différentes villes et bourgs de la zone.

Au-delà d’une nécessaire opération de désarmement et de démantèlement des milices, l’Ouest a sans doute besoin d’une réconciliation profonde, qui aille bien au-delà des discours. Mais aussi de perspectives économiques nouvelles, au-delà de la cueillette du cacao, qui ne dégage plus une valeur ajoutée suffisante pour satisfaire le plus grand nombre. 

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