Côte d’Ivoire : « Je sens que je vais craquer »

Otages d’une guerre qui les dépasse, les Abidjanais s’organisent, tentent de sauver des vies, prient le ciel… La peur au ventre.

Barrage de pneus brûlés dressé par des habitants du quartier d’Abobo à Abidjan. © AFP

Barrage de pneus brûlés dressé par des habitants du quartier d’Abobo à Abidjan. © AFP

Publié le 12 avril 2011 Lecture : 2 minutes.

Allongé dans son appartement d’Adjamé, Manassé Dehe était au bord de la crise de nerfs en cette matinée du jeudi 7 avril : « Je sens que je vais craquer. » Les roquettes et les obus tonnent, et font régulièrement vaciller son immeuble. Malgré la peur, le manque d’eau et souvent d’électricité, ce développeur informatique de 25 ans tient à se rendre utile. Dans l’ambiance apocalyptique d’une métropole de 5 millions d’habitants où marchés, hôpitaux, banques et transports ont cessé de fonctionner, il met en relation, avec l’aide d’amis blogueurs, des personnes en détresse avec celles qui peuvent leur apporter un secours. Une initiative qui sauve des vies. Celle de Joël, par exemple, qui a reçu une balle dans le cou. Alerté, un internaute est venu le récupérer chez lui, au péril de sa vie, et l’a tout de suite conduit dans une clinique, où il a pu être opéré. Tout le monde n’a pas eu cette chance. Faute de soins, des personnes vivant sous dialyse meurent à petit feu. Certains accouchements difficiles, qui ont lieu à domicile, se transforment souvent en tragédies, notamment par manque de poches de sang pour les transfusions. Dans des cliniques réputées, les malades n’ont plus rien à manger. Sur Facebook, la patronne d’une agence de publicité propose à ceux qui le peuvent d’aller leur donner des vivres, mais surtout d’y aller en convoi…

Aucune solidarité ne semble en tout cas de nature à faire reculer les hordes de pillards. « Ils sont venus cogner à ma porte. Ils faisaient un boucan énorme. Puis j’ai entendu quelqu’un dire que nous n’avions pas de 4×4. Ils sont partis », raconte Linda, qui vit à la Riviera Golf, à cinq minutes en voiture du Golf Hôtel, quartier général des Forces républicaines de Côte d’Ivoire (FRCI), fidèles à Alassane Ouattara. La libération par les membres du « commando invisible » pro-Ouattara des 6 000 prisonniers de la Maison d’arrêt et de correction d’Abidjan (Maca) n’a rien arrangé…

la suite après cette publicité

Épidémies

« Qui peut appeler pour l’enlèvement des morts dans les rues ? » s’interroge Lancina, qui redoute – comme la communauté des humanitaires, totalement impuissante – l’apparition d’épidémies, alors que les ordures ménagères s’amoncellent depuis plusieurs mois déjà.

Abandonnés à leur sort, otages d’une guerre qui les dépasse, de nombreux Abidjanais tournent leur regard vers le ciel, scrutant des signes annonciateurs d’une éventuelle délivrance. Dans les quartiers, des prières collectives sont organisées. Et le pasteur-vedette Mohammed Sanogo réunit des centaines de fidèles chaque jour par le biais d’une Web TV improvisée…

La Matinale.

Chaque matin, recevez les 10 informations clés de l’actualité africaine.

Image

La rédaction vous recommande

 © Glez

Facebook et Twitter : sites de secours

Contenus partenaires