Imad Bouziane : « En 2013, un engrais 40 % moins cher »
Le jeune cadre marocain de l’OCP a pour mission d’accroître la part de marché du groupe en Afrique.
Le géant marocain des phosphates et des engrais (4,8 milliards d’euros de chiffre d’affaires à l’export en 2008) a longtemps donné la priorité à ses clients européens, indiens et chinois. Mais depuis l’arrivée en 2006 de Mostafa Terrab à la direction générale du groupe, l’Office chérifien des phosphates (OCP) s’est réorienté vers l’Afrique et veut y faire progresser ses ventes. C’est à Imad Bouziane, 30 ans, ancien de Procter & Gamble, qu’a été confiée cette tâche en 2008. Pour cet ingénieur casablancais formé en France, les challenges ne manquent pas.
Jeune Afrique : En avril 2010, l’OCP annonçait mettre l’Afrique au cœur de sa stratégie commerciale. Où en êtes-vous un an plus tard ?
Imad Bouziane : Avec 18 % des terres arables du globe pour seulement 1 % des engrais consommés, l’Afrique est pour nous une opportunité commerciale et un devoir moral. Depuis 2008, nous réservons des volumes d’engrais au continent, même en cas de forte tension sur l’offre et malgré la complexité et le coût de l’acheminement des produits.
Mais que pèse réellement l’Afrique dans les affaires de l’OCP ?
Le continent, hors Maroc, représente déjà autour de 3 % de notre chiffre d’affaires, et, depuis cinq ans, nos ventes y progressent en moyenne de 20 % à 30 % chaque année.
Quelle est votre méthode ?
Il ne s’agit pas simplement de trouver des acheteurs, mais plutôt des partenaires, importateurs-distributeurs de premier plan capables de développer leurs marchés nationaux, comme Toguna Industries au Mali, Yara au Ghana, ou Mea au Kenya, avec lequel nous venons de signer un contrat de 100 000 tonnes pour 46,1 millions d’euros. Nous en choisissons un seul par pays et tissons une relation forte avec lui, en l’appuyant techniquement et humainement. La plupart ont la capacité de repréparer nos engrais pour mieux les adapter à leurs sols.
Quels sont les pays où les engrais marocains se vendent le mieux ?
D’abord le Ghana, puis le Mali, l’Éthiopie et le Kenya. Ces pays ont remis en selle leur politique agricole et se sont dotés d’organismes publics efficaces, comme le Cocoa Board au Ghana. D’autres peinent à décoller, malgré un potentiel agricole extraordinaire, comme la RD Congo ou le Cameroun. Avec sa taille de mastodonte, le Nigeria est quant à lui un marché difficile à pénétrer.
Des chantiers en cours ?
Nous avons lancé un programme de recherche sur les roches phosphatées, un engrais naturel disponible dans nos mines, de 30 % à 40 % moins cher que les produits transformés, actuellement en test chez six de nos partenaires africains. Si les résultats sont bons, nous pourrons le commercialiser en 2013. Enfin, nous réfléchissons à un conditionnement en sacs de 5 kg, d’un prix plus accessible.
Travailler au sud du Sahara, quelle satisfaction cela vous apporte ?
Je m’y sens bien, notamment dans les pays ouest-africains francophones, où je partage des références culturelles et religieuses avec mes interlocuteurs. J’ai travaillé dans d’autres univers, mais ici les challenges humains et logistiques sont plus complexes, et je trouve plus de sens à ce que je fais : le développement de l’agriculture a un impact positif sur la vie des populations.
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Propos recueillis par Christophe Le Bec
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