Lacroix d’Orient

Jusqu’au 15 mai, le musée du Quai Branly et le couturier français Christian Lacroix rendent hommage aux femmes orientales à travers 150 parures et costumes traditionnels.

Manteau de fête (Syrie, vers 1930). © Musée du Quai Branly. Photo Thierry Ollivier, Michel Urtado

Manteau de fête (Syrie, vers 1930). © Musée du Quai Branly. Photo Thierry Ollivier, Michel Urtado

Publié le 18 avril 2011 Lecture : 2 minutes.

Sur une robe de fête couleur sable tissée de soie s’entrechoquent de joyeux rouges, bleus, verts et noirs. De fines broderies s’y alignent en bandes verticales et ses manches, très collantes jusqu’aux poignets, s’achèvent en longues pointes, telles des ailes d’oiseaux. Cet habit traditionnel des femmes syriennes provient de la province de Rif Dimashq. Suspendu à des fils, il semble s’envoler, comme les cent autres costumes de Bédouines et paysannes du Proche-Orient dévoilés jusqu’au 15 mai au musée du Quai Branly. Une cinquantaine de parures – coiffes, voiles, gilets, bijoux – complètent l’exposition « L’Orient des femmes vu par Christian Lacroix ».

Provenant de la région couvrant le nord de la Syrie jusqu’à la péninsule du Sinaï, ces tenues chamarrées datent de la période allant de la fin du XIXe siècle à nos jours. Comme portées par des mannequins invisibles, ces pièces à la coupe très simple mais richement brodées avec des fils de coton, lin et soie, semblent défiler sur un podium du couturier français, directeur artistique de l’événement. La pièce la plus singulière est une robe antérieure à cette période (XIIIe siècle), ornée de motifs cruciformes rouges. Découverte lors de fouilles archéologiques en 1991 dans une grotte de la vallée de Qadisha, dans le Nord-Liban, elle appartenait à une fillette ensevelie aux côtés de sa mère en 1283. Elle est caractéristique des teintures végétales, l’indigo pour les bleus, la garance pour les rouges et la noix de Galles pour les marrons.

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De la Syrie à la Palestine en passant par la Jordanie, l’on découvre l’art de la broderie d’une incroyable créativité. Inspiré par l’environnement (fleurs, arbres, animaux…), chaque dessin a une symbolique. Le triangle et le losange repoussaient le mauvais œil, tandis que le rouge, omniprésent, était porteur de fécondité.

Christian Lacroix a pris soin d’envelopper cette précieuse collection d’un écrin intime et chaleureux constitué de ses propres créations. Il a dessiné la moquette à gros motifs orientaux qui orne le sol. La frise couleur or sublimée d’arabesques noires, les néons multicolores et les grands coffres de bois dans lesquels sont présentés les trousseaux de la jeune mariée ont été spécialement créés par le couturier.

La création traditionnelle orientale ayant disparu avec l’occidentalisation et l’islamisation, la commissaire de l’exposition Hana Chidiac ne voulait pas faire une exposition nostalgique. « Celle-ci ne doit pas être une simple “promenade ethnographique” offrant un panorama de costumes riches et inédits, explique-t-elle. Elle doit surtout être un hommage aux femmes orientales. » Le nom de Lacroix en tant qu’associé lui est venu naturellement. Depuis que sa maison de couture est en cessation d’activité, il se consacre à la création de scénographies d’exposition et de costumes de scène pour l’opéra. La commissaire a fait une sélection très large de robes, sur laquelle Lacroix est venu apporter son regard d’esthète. « Ce sont des “robes écrites” qui racontent une terre d’origine, un milieu social ou religieux, un art de vivre, une manière d’être », affirme-t-il à propos de ces costumes, ultimes témoins d’un art vestimentaire ancestral.

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