La Côte d’Ivoire sur le sentier de la guerre

Lentement mais sûrement, la Côte d’Ivoire bascule dans la guerre civile. Sentant que les choses lui échappent, le président sortant Laurent Gbagbo a lui-même demandé à son homologue burkinabè Blaise Compaoré de convaincre Alassane Ouattara et Guillaume Soro de calmer leurs troupes.

Dans le quartier d’Abobo, à Abidjan, le 15 mars. © Issouf Sanogo/AFP

Dans le quartier d’Abobo, à Abidjan, le 15 mars. © Issouf Sanogo/AFP

Publié le 25 mars 2011 Lecture : 2 minutes.

De l’aveu même de Laurent Gbagbo, la situation est devenue incontrôlable à Abidjan. Tel est le message qu’il a adressé au président Blaise Compaoré, le 16 mars, en le priant d’intercéder auprès d’Alassane Ouattara et de Guillaume Soro pour qu’ils calment leurs troupes.

Le facilitateur burkinabè lui a alors suggéré de suivre les conseils que Jacob Zuma, le président sud-africain, lui avait prodigués la veille. À savoir : se conformer aux décisions de l’Union africaine (UA), demandant à Ouattara de former un gouvernement d’ouverture. « Avec les deux chefs d’État, Gbagbo est resté évasif, raconte un diplomate ouest-africain. Il a promis d’examiner les propositions de l’UA tout en continuant à consulter ses troupes. Encore une fois, il joue la montre en espérant renverser une situation qui lui est de plus en plus défavorable. »

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Toute la semaine dernière, le camp Gbagbo a fait courir le bruit d’une intervention télévisée imminente, au cours de laquelle son chef devait décréter l’état d’urgence ou l’état de siège. Avant de se contenter, le 18 mars, d’un simple communiqué appelant à l’ouverture d’un « dialogue interivoirien ».

Barrages et lynchages

Sur le terrain, l’horreur le dispute à l’abominable. Lentement mais sûrement, le pays bascule dans la guerre civile. Prise entre deux feux, la population vit dans la terreur. Dans l’Ouest, les violents combats opposent les Forces nouvelles (FN), dont l’objectif est de progresser vers le sud pour contrôler la boucle du cacao et le port de San Pedro, aux troupes fidèles à Gbagbo. Ces affrontements ont poussé plus de 80 000 personnes à s’exiler au Liberia voisin.

À Abidjan, près des centaines de milliers d’habitants ont fui les quartiers périphériques, où les militaires pro-Gbagbo et le « commando invisible » (insurgés composés d’éléments des FN, de jeunes pro-Ouattara et de transfuges des Forces de défense et de sécurité) se battent quotidiennement. « Cet exode a pris une telle ampleur qu’il fait craindre une catastrophe humanitaire, faute d’endroit où accueillir les déplacés », s’alarme la Fédération internationale des ligues des droits de l’homme (FIDH).

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Depuis deux semaines, les forces pro-Ouattara lancent des opérations éclairs au-delà de leur fief d’Abobo, comme à Yopougon et à Koumassi. Perdant le contrôle de la ville, les éléments des forces de sécurité proches de Gbagbo ont sorti l’artillerie lourde, tirant, le 17 mars, des obus sur les habitations d’Abobo. Bilan, selon l’Onuci : une trentaine de victimes et plus de cinquante blessés. Dans plusieurs quartiers d’Abidjan, les partisans des deux camps ont érigé des barrages de fortune. De simples contrôles d’identité se terminent parfois en lynchage. Le camp Ouattara dénonce les agissements de miliciens qui « forcent les portes des domiciles, font sortir les adultes et les jeunes hommes et les abattent froidement devant leur famille », et a adressé un mémorandum à la Cour pénale internationale (CPI). De leur côté, la FIDH et l’Onuci appellent les deux parties à mettre fin aux hostilités. Un appel qui a toutes les chances de rester lettre morte…

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