Gbagbo n’est pas Ben Ali

Depuis un mois, la polarisation médiatique et diplomatique sur les événements de Tunisie et d’Égypte a ouvert ce que l’on pourrait appeler une fenêtre d’opportunité pour quelques responsables subsahariens confrontés à des crises de légitimité et qui n’ignorent pas à quel point la fameuse communauté internationale est à la fois versatile et inconstante.

FRANCOIS-SOUDAN_2024

Publié le 7 février 2011 Lecture : 2 minutes.

L’élection présidentielle en Centrafrique, contestée par l’opposition, est ainsi passée comme une lettre à la poste, à l’instar du tripatouillage constitutionnel en cours en RDC, qui a déjà débouché sur une modification du mode de scrutin.

Orfèvre en la matière, Laurent Gbagbo est sans doute celui qui a su le mieux mettre à profit ce détournement de focale pour que, imperceptiblement, ainsi que le démontrent les résultats « ivoiriens » du dernier sommet de l’Union africaine, on ne parle plus du problème (un coup d’État électoral), mais de la solution (comment s’en sortir sans recourir à une intervention militaire dont plus personne ne veut prendre la responsabilité).

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À cet égard, on me permettra ces trois avertissements à l’usage des membres du panel des chefs d’État chargés par leurs confrères d’une énième médiation. Sachez que Gbagbo ne partira pas. Il n’est pas Ben Ali. Ni les sanctions, ni les menaces de la CPI, ni l’étau financier, qu’il estime pouvoir contourner des mois encore, ni la rue – d’autant qu’elle lui est majoritairement acquise à Abidjan –, ni les gesticulations militaires ne le feront bouger. C’est un survivant, prêt à mourir dans les décombres de son palais.

Sachez que Ouattara ne cédera pas. C’est le combat de sa vie, dans lequel il a engagé la totalité de ses proches et de ses partisans. Il y joue sa propre crédibilité, celle de l’ONU, de la Cedeao et de tous ceux qui, à l’extérieur, le soutiennent. Sachez enfin que l’un et l’autre ont désormais franchi le Rubicon, brûlé leurs vaisseaux, et qu’une conciliation entre les deux (trois avec Bédié) semble impossible tant leur affrontement a révélé de haines insoupçonnées. Cela étant dit, bonne chance et bon courage…

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PS: Notre dernière enquête sur le bilan de Joseph Kabila a déclenché un petit tsunami politicomédiatique à Kinshasa. Aussitôt après nous avoir fait parvenir un long droit de réponse, le ministre de la Communication, Lambert Mende a, sur ordre, été le lire en direct à la télévision, avant d’en arroser la presse qu’il contrôle. Le tout assorti d’accusations aussi paranoïaques que diffamatoires. Nous aurions pu aisément arguer de cette mauvaise manière pour refuser de publier ce texte, mais nous l’avons néanmoins maintenu. Pour deux raisons. J.A. a toujours ouvert ses colonnes à la contradiction, fût-elle la plus vive: telle est notre conception de la liberté d’expression. Et la lecture de ce droit de réponse suffit en elle-même à valider le bienfondé de notre diagnostic: de Mobutu à Kabila, il n’y a que les hommes qui changent.

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