Les lecteurs de JA réagissent à l’actualité tunisienne

Félicitations, espoirs, mais aussi inquiétudes pour l’avenir d’une révolution encore fragile : l’actualité tunisienne intéresse au-delà des frontières du pays.

Couverture du J.A. n° 2611. © J.A.

Couverture du J.A. n° 2611. © J.A.

Publié le 11 février 2011 Lecture : 4 minutes.

« Mon monde s’effondre »

– Si l’ex-président Ben Ali était un écrivain, ce serait peut-être le titre de son dernier roman. Comme un château de cartes, le système politique qu’il a érigé pendant plusieurs années est tombé. Qui l’aurait imaginé ? La Tunisie était souvent présentée comme la Suisse du Maghreb, un pays où il fait bon vivre : des infrastructures hospitalières de haut niveau, des universités, des villes touristiques attirant des milliers de retraités français, une économie avec des indicateurs au vert. Les arbres cachaient visiblement la forêt. L’ex-président est attaqué sur plusieurs fronts ; l’exil ne sera pas de tout repos, d’autant qu’il a l’obligation de garder le silence. La révolution est en marche, et il faut espérer que les Tunisiens trouveront la voie du salut.

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L’année 2011 sera riche en événements : pas moins de dix-huit élections présidentielles sont prévues sur le continent. Mais les scénarios ne seront pas nécessairement identiques. La Tunisie, c’est la Tunisie…

Hugues Mbala, Douala, Cameroun

Il fallait lire entre les lignes

– Je connais Jeune Afrique depuis 1971. Vous m’avez accompagnée et « instruite » durant tout ce temps, sauf un interlude – trop long ­– durant lequel le reste du monde ne m’importait guère !

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Pas d’accord avec vos lecteurs râleurs. Il suffisait de lire entre les lignes. Se glissait très souvent, à une autre page que l’article principal, un flash attirant l’attention sur le revers de la médaille. En outre, un journal est fait pour des lecteurs. S’il est interdit ou trop censuré, je ne vois pas l’intérêt. À nous de bouger nos neurones ! Bravo, donc, pour votre couverture de la Tunisie. Un énorme merci à tous.

Jacqueline Donnart, Audierne, France

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Protéger la deuxième révolution tunisienne

– La révolution que le peuple tunisien a déclenchée le 14 janvier 2011 contre l’arbitraire, la tyrannie et la corruption est la deuxième révolution de grande ampleur lancée en soixante ans par les enfants de cette nation. La première avait été déclenchée le 18 janvier 1952, lorsque le peuple tunisien avait revendiqué sa liberté, la maîtrise de son destin et une vie digne, dénonçant le colonialisme, la perte de l’identité, le pouvoir absolu, la corruption et le népotisme.JA 2611 du 23 au 29 Janvier

Aujourd’hui, alors que le peuple a aboli le pouvoir de Ben Ali et connu ses premières victoires grâce aux forces vives qui soutiennent sa détermination et qui croient à la démocratie et à la liberté, il faut faire attention aux dangers qui guettent cette révolution, comme ce fut le cas pour la première. Il convient de rester vigilant pour ne pas se laisser entraîner par les forces qui voudraient se l’approprier ou en accaparer les fruits, déjouer les menées des parties étrangères, des idéologues ou des ronds-de-cuir qui restent rivés aux méthodes et pratiques méprisables inculquées par le régime de Ben Ali.

Béchir Ben Slama, e-mail

Quel avenir pour les islamistes ?

– Bonjour monsieur Ben Yahmed,

Je suis très sensible à tout ce qui peut se passer en Tunisie ; j’y ai résidé à la fin des années 1970 et, dans mon cœur, c’est mon deuxième pays. J’ai lu avec intérêt votre article « Jours de victoire… » dans Jeune Afrique n° 2610. J’ai bien compris que le peuple a été poussé à bout depuis des années par le régime et que la crise économique a été la goutte d’eau qui a fait déborder le vase. Le peuple tunisien a gagné la première manche, mais la période de transition qui s’ouvre me semble très aléatoire. J’aimerais avoir votre opinion sur les mouvements islamistes radicaux qui ne vont pas manquer de revenir dans le jeu à la faveur du retour de la liberté d’expression. Je ne suis pas « antimusulman », mais je pense qu’une forme d’islamisme radical ne correspond pas à ce que recherchaient les Tunisiens et les Tunisiennes à travers cet acte de courage qu’a représenté la « révolution du jasmin ».

Patrick Leverrier, e-mail

Les Tunisiens refusent d’être manipulés

À mes concitoyens tunisiens : cette révolution est la vôtre. Vous devez en être fiers et en prendre bien soin. Les ennemis de tout poil espèrent vous voir sombrer dans le chaos, ne leur laissez même pas l’occasion d’y penser. Les nostalgiques de l’ancien régime et les fidèles du « Retour à la Case Départ » (RCD) se dissoudront d’eux-mêmes. Ne vous enlisez pas dans des querelles sans fin. Rejoignez vos lieux de travail, regagnez les bancs de vos écoles et facultés ; faites redémarrer le moteur pour qu’il carbure à plein régime, et nous arriverons à bon port sains et saufs, heureux, libres et fiers de l’être.

Et à nos amis et frères arabes, africains et musulmans : cette révolution, qui est par essence populaire, tunisienne, n’est pas à exporter. Les Tunisiens, qui se gardent bien d’inciter à la violence, refusent d’être manipulés.

Salem Naceur, Nabeul, Tunisie

Éveiller les consciences, quoi qu’il en coûte

– Mon cher Béchir,

Le peuple tunisien, sous le regard étonné et admiratif du monde entier, a chassé le despote. Un despote que vous – une institution pour des générations de jeunes Africains – avez ménagé durant toutes ces années. Sur ce tyran de Ben Ali, vous vous êtes trompé. L’erreur étant humaine, les milliers de jeunes Africains qui vous lisent avidement chaque semaine n’attendent pas de vous un mea culpa. Mais nous souhaitons que vous cessiez de faire des concessions aux nombreux régimes corrompus qui gangrènent le continent. Continuer d’éveiller les consciences, quoi qu’il en coûte, doit rester votre credo. Les graines que vous semez contre vents et marées porteront forcément leurs fruits. Les Tunisiens ont montré qu’il n’y a pas meilleur rempart pour un peuple qu’une jeunesse éveillée.

Dr Boubacar Fall, Médecin à Dakar, Sénégal

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