Ben Ali et l’armée tunisienne

Comme toute armée républicaine, l’armée tunisienne veut se consacrer à la défense de la patrie et ne souhaite donc pas que les responsables politiques l’impliquent dans les opérations de sécurité intérieure. Deux faits ont lourdement pesé dans la décision du général Rachid Ammar de ne pas tirer sur les manifestants.

Lors d’une manifestation anti-RCD, le 20 janvier, à Tunis. © Martin Bureau/AFP

Lors d’une manifestation anti-RCD, le 20 janvier, à Tunis. © Martin Bureau/AFP

Publié le 11 février 2011 Lecture : 2 minutes.

En décembre 2007 et janvier 2008, le pouvoir oblige l’armée à participer à la neutralisation d’un groupuscule de jeunes salafistes, à Soliman. Peu armés et sommairement entraînés, ces derniers auraient pu être maîtrisés, comme l’ont démontré les débats lors du procès, par les seules forces de sécurité intérieure, estimées à 150 000 hommes. « On n’avait même pas besoin de l’intervention sanglante des snipers du général Ali Seriati, chef de la garde présidentielle. L’armée a tout fait pour éviter un bain de sang », assure-t-on dans les mess des officiers.

Mystérieux crash

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L’armée n’a pas non plus oublié le mystérieux crash, le 30 avril 2002, à Medjez el-Bab, d’un hélicoptère à bord duquel se trouvaient treize officiers et sous-officiers, dont Abdelaziz Skik, chef d’état-major de l’armée de terre, auquel a succédé Rachid Ammar. Ils revenaient d’une visite d’inspection dans la région du Kef, non loin de la frontière tuniso-algérienne. Officiellement, on a parlé d’un accident, mais vu les conditions météorologiques, l’explosion de l’appareil a paru suspecte, et l’hypothèse la plus répandue, mais non vérifiée, est que Ben Ali les aurait éliminés pour des raisons politiques.

Les officiers supérieurs actuels n’ont jamais eu de relations particulières avec l’ex-raïs, leur aîné de dix ans, qui a quitté l’armée en 1974 pour aller dans le civil sous le parrainage d’Abdallah Farhat, un dur du parti unique de l’époque. Quand Ben Ali dépose Bourguiba le 7 novembre 1987, c’est aux services de sécurité intérieure qu’il a recours et non à l’armée, qui ne s’en est pas mêlée, même si un médecin militaire figure parmi les signataires du certificat médical attestant la sénilité de Bourguiba.

Devenu président, Ben Ali s’est laissé convaincre de créer un Conseil de sécurité nationale. L’idée était de Hédi Baccouche.

Mais ce conseil ne s’est réuni que deux fois. Ben Ali ne voulait pas que des officiers supérieurs prennent l’habitude de partager le pouvoir avec lui. Il a remplacé le Conseil de sécurité nationale par un Conseil supérieur des armées, dont les réunions irrégulières sont consacrées à des questions de routine.

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Débauchage

Ben Ali a cependant réussi à « débaucher » des officiers supérieurs, comme Habib Ammar, qu’il a nommé à la tête de la garde nationale, qui dépend de l’armée. C’est Ammar qui a pris le plus de risques lors du coup d’État du 7 novembre 1987, pendant que Ben Ali se terrait au ministère de l’Intérieur. Il y a aussi le général Mohamed Hédi Belhassine, nommé directeur général de la sûreté en 2002, mais aussi et surtout Ali Seriati, devenu le « sécurocrate » du Palais de Carthage. Au service personnel de Ben Ali et de son épouse Leïla, il dirigeait une garde présidentielle composée de 5 000 hommes, renforcée par une milice de sinistre mémoire, qui a participé à la répression du mouvement de contestation et semé la terreur trois nuits durant après la fuite de Ben Ali. Seriati est aujourd’hui sous les verrous. 

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