Incohérences
Étrange paso doble diplomatique franco-américain, entre Tunis et Le Caire, en cette fin janvier.
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François Soudan
Directeur de la rédaction de Jeune Afrique.
Publié le 31 janvier 2011 Lecture : 2 minutes.
D’un côté, une administration Obama très en pointe sur la révolution tunisienne et qui peut remercier sa bête noire – WikiLeaks – d’avoir révélé à quel point son ambassadeur sur place avait vu juste sur les dérives du régime Ben Ali. De l’autre, une France officielle assez pitoyable dans son aveuglement et contrainte depuis le 14 janvier à un douloureux exercice de contrition.
Et voici que l’intifada égyptienne vient à point pour – presque – renverser les rôles. Le 25 janvier, alors que gronde la rue cairote, Barack Obama n’oublie pas dans son discours sur l’état de l’Union de rendre hommage aux Tunisiens, mais ne dit mot sur leurs frères égyptiens. Si, le même jour, Hillary Clinton parle à sa place, c’est pour se féliciter de la stabilité d’un pouvoir qui, dit-elle, « cherche la réponse appropriée » à apporter aux émeutiers.
En revanche, visiblement échaudé par ses cafouillages tunisiens, le gouvernement Sarkozy se veut, lui, en première ligne. Alain Juppé, que l’on avait rarement connu aussi pugnace, n’hésite pas à qualifier le régime Moubarak de « très certainement autoritaire » et Michèle Alliot-Marie se dit affligée par le nombre des victimes de la répression.
On dira, certes, que l’Égypte, qui absorbe chaque année 1,3 milliard de dollars (940 millions d’euros) d’aide militaire américaine (et près de 1 milliard de dollars en moyenne d’aide économique) est pour Washington l’un des deux piliers, avec Israël, de sa politique sécuritaire dans la région, alors que la Tunisie ne représente pas un intérêt stratégique majeur. Une situation quasi inverse de celle de la France. On dira aussi, à juste titre, que l’administration Obama a, depuis le 25 janvier, durci le ton à l’égard de son allié. Il n’empêche : de Washington à Paris, la crainte de voir l’épuisement d’un certain « modèle arabe » autocratique, sclérosé et souvent dynastique susciter un effet domino n’a pas encore produit un discours cohérent. Et surtout recevable, auprès d’une opinion régionale depuis longtemps exaspérée par la complaisance des Occidentaux vis-à-vis de la politique israélienne.
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