Gabon – Libye : Africa n° 1 sur le gril

La radio panafricaine fait face à des difficultés financières récurrentes et peine à redresser la barre. Elle s’apprête à investir 8,5 millions d’euros et à lancer de nouveaux programmes pour reconquérir les auditeurs du continent.

Dans les studios parisiens d’Africa n° 1, enregistrement de l’émission « Les Matins d’Eugénie ». © Vincent Fournier pour J.A.

Dans les studios parisiens d’Africa n° 1, enregistrement de l’émission « Les Matins d’Eugénie ». © Vincent Fournier pour J.A.

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© Vincent Fournier pour JA

Publié le 1 février 2011 Lecture : 4 minutes.

Vu de l’extérieur, Africa no 1 est en train de changer. » En cet après-midi de mi-décembre, à Libreville, au rez-de-chaussée de l’immeuble qui abrite le siège de la radio panafricaine, Ludovic Koumba fait ainsi allusion à la rénovation du bâtiment. Et pour l’avenir d’Africa no 1, en déclin depuis une dizaine d’années, ce journaliste chargé de la coordination des programmes se veut plutôt confiant.

Mais pour l’heure, le renouveau annoncé depuis l’arrivée, en 2008, du nouvel actionnaire majoritaire (52 % du capital), la Libyan Jamahiriya Broad­casting (LJB), tarde à se concrétiser et s’arrête à la façade du siège de la station. Car, en réalité, la situation d’Africa no 1 reste délicate. « Si on sait que les salaires du mois de janvier vont être payés, c’est l’incertitude totale pour ce qui est des mois à venir », affirme, inquiète, une source interne à la radio. L’effectif des journalistes a été considérablement réduit, passant d’une centaine à une quarantaine de salariés à Libreville après la reprise de la radio par les Libyens. Le 14 janvier, l’administrateur-directeur général, Elbashir Abubaker, en poste depuis neuf mois, s’est rendu à Tripoli pour négocier auprès du Libya Africa Portfolio (le fonds d’investissement qui gère la part de LJB au capital d’Africa no 1) le déblocage de fonds nécessaires pour faire face aux besoins immédiats de la radio.

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Devancé par RFI et la BBC

« C’est dur à vivre, mais il est encore plus difficile d’entendre les auditeurs dire qu’Africa no 1 n’est plus une radio de référence », affirme Patrick Bibang, coordinateur des services de la rédaction. Aucune étude récente ne permet de mesurer l’audience actuelle d’Africa no 1, mais il est certain que la station gabonaise est aujourd’hui bien loin des 20 millions d’auditeurs quotidiens qu’elle atteignait sur l’ensemble du continent dans les années 1990. Elle se revendiquait alors comme la cinquième radio au monde ; un positionnement qui lui assurait d’importantes recettes publicitaires. « L’émergence de radios privées nous a placé dans un environnement concurrentiel avec de nouvelles exigences », explique Ngangha Crépin, le directeur de l’antenne. « Et dans cet environnement concurrentiel où il est impératif d’innover sans cesse, la grille des programmes n’a pas été modifiée depuis quatre ans », poursuit Théophile Ndong Edda, le spécialiste sports de la maison.

À cela il faut ajouter le manque cruel d’investissements dans le renouvellement du matériel. Les émetteurs d’Africa no 1 n’ont pas été changés depuis 1995. « Or la durée de vie de ces outils est d’une quinzaine d’années », précise Dominique Guihot, le patron de la branche parisienne de la radio. Dans le même temps, la concurrence met les bouchées doubles pour gagner du terrain. Ainsi, alors que la radio panafricaine ne compte que 19 fréquences sur le continent, dont 17 en Afrique franco­phone, Radio France Internationale (RFI) et la BBC en possèdent respectivement 109 et 29. Conséquence, en dehors de quelques rares capitales, notamment à Libreville, son fief, où la radio panafricaine résiste encore, elle a cédé des parts de marché à RFI et à la BBC.

En décembre 2010, lors de leur conseil d’administration à Libreville, les dirigeants ont finalisé et défini les moyens nécessaires au financement du plan d’urgence 2011-2013. Celui-ci prévoit notamment le démarrage prochain d’un processus de recrutement d’une quarantaine de journalistes et de techniciens à Libreville, la réhabilitation d’une trentaine de sites en Afrique, mais aussi, et surtout, l’acquisition d’un émetteur de 300 kW pour renforcer celui de Moyabi, à environ 600 km de la capitale gabonaise. Montant total de l’investissement : quelque 8,5 millions d’euros. « L’objectif, indique Elbashir Abubaker, est de redéployer le réseau FM et d’atteindre les zones les plus reculées. » De fait, Africa no 1 est de retour en ondes courtes à Douala depuis près d’un an et à Kinshasa depuis deux mois. Doivent suivre Abidjan et Bamako.

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Nouveaux programmes

Ce n’est pas tout. « Une nouvelle grille devrait être lancée », assure-t-on à Libreville. Elle aura trois principaux socles : l’information, le débat (donner encore plus la parole aux auditeurs) et les sports (accorder davantage de place aux sports autres que le football)… À terme, la radio ambitionne d’émettre en anglais, en arabe, et même en swahili, « pour répondre réellement à sa vocation panafricaine », affirme Patrick Bibang. Mais pour y parvenir, les actionnaires, notamment l’État gabonais, devront tenir leurs engagements. Selon Jean Nativité Ongala, le directeur général adjoint chargé de l’exploitation, « la coorganisation en 2012 de la Coupe d’Afrique des nations par le Gabon et la Guinée équatoriale constitue une belle opportunité de [se] repositionner comme le média phare du continent ». En attendant qu’elle retrouve la place qui était la sienne dans l’univers audiovisuel africain, la radio gabonaise peut compter sur son antenne parisienne pour la tirer vers le haut. Car Africa no 1 Paris, qu’elle détient à 20 %, se porte bien. Éditée par Africa Média, une société de droit français qui en détient 67 % des parts, la station parisienne a réussi à conserver, voire à améliorer son audience, qui est aujourd’hui de plus de 600 000 auditeurs par semaine. « C’est, selon Dominique Guihot, le résultat d’investissements pour offrir un confort d’écoute aux auditeurs mais aussi du développement d’un certain nombre de nouveaux programmes. » Africa no 1 Paris réalise un chiffre d’affaires annuel de plus de 1 million d’euros.

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