Bonnes nouvelles pour l’Afrique

Ici même, il y a onze mois, nous évoquions les « gros nuages » qui menaçaient le continent. Ils sont venus du Nord tout au long de l’année et vite repartis. On pouvait redouter que la crise ne suscitât des crispations protectionnistes risquant de gripper le commerce international : elles ne se sont manifestées que de façon marginale.

L’agitation qui, en fin d’année 2010, a poussé les grands pays à s’accuser mutuellement de tripoter le cours de leur devise n’a pas débouché sur une « guerre des monnaies », qui eût été suicidaire. Les taux d’intérêt n’ont pas flambé. L’euro et l’Europe ont résisté à la crise des dettes grecque, irlandaise, portugaise, espagnole, etc., qui a bien failli étrangler la croissance du Vieux Continent. Le sommet du G20 à Séoul – certes peu glorieux – a eu le mérite de convaincre ses membres qu’ils ne pouvaient redresser leurs économies et résoudre leurs problèmes sociaux qu’ensemble.

Voilà qu’en ce début d’année les grandes institutions se préparent à revoir à la hausse leurs prédictions de croissance. Le Fonds monétaire international (FMI) ouvrira le bal, mardi 25 janvier à Johannesburg, en confirmant que la principale locomotive mondiale, les États-Unis, accélère sa cadence, passant d’une prévision de + 2,3 % à + 2,5 %. Ce n’est pas encore très dynamique, mais la consommation se renforce et l’immobilier s’assainit. Il ne reste plus au président Obama qu’à convaincre les entreprises privées d’investir les centaines de milliards de dollars qu’elles gardent sous le coude. L’Europe n’est pas en reste, quoiqu’un ton au-dessous, alors qu’on la disait encalminée pour des années. En Allemagne, en France, la consommation est vigoureuse et le chômage se tasse légèrement. Manque, certes, le moral, l’envie de se lancer dans de grands projets d’avenir. À l’autre bout du monde, la Chine semble parvenir à maîtriser la vigueur de sa croissance. En surveillant de plus près ses banques et leurs crédits, en laissant prudemment s’apprécier le yuan, Pékin fait pivoter en douceur son économie – jusque-là focalisée sur l’exportation – vers un modèle plus centré sur le développement domestique et la consommation intérieure.

L’Afrique va profiter de cette conjoncture porteuse, qui voit les pays industrialisés accélérer au moment où la Chine se modère :

1/ Ce rééquilibrage éloigne les risques de soubresauts mondiaux qui nuisent à l’activité ­économique.

2/ Les matières premières dont regorge le continent promettent d’être toujours très demandées. Le pétrole et le charbon bien sûr, mais aussi les métaux non ferreux, le sucre, le coton, le cacao, le riz – pour ne citer que ceux-là – verront leur prix orienté à la hausse. Cela posera des problèmes de pouvoir d’achat aux populations urbaines exposées à une inflation du prix des produits alimentaires, mais apportera des emplois et un peu de mieux-être dans le monde rural.

3/ Les capitaux continueront à revenir en Afrique. Ils cherchent à s’investir dans les pays en développement, car les profits s’y annoncent mirifiques. Le continent leur apparaît de plus en plus comme une terre d’opportunités, avec l’apparition de ses classes moyennes et une croissance démographique qui portera sa population à près de 2 milliards de personnes en 2050 – soit environ le double de ce qu’elle est actuellement –, selon le Fonds des Nations unies pour la population. Un marché de rêve !

Tous les feux sont donc au vert pour que l’Afrique fasse mieux que les 5 % ou 6 % de croissance annuelle qu’elle a atteints au cours de la décennie 2000. À condition de ne pas relâcher ses efforts en faveur d’une meilleure gouvernance, et de ne surtout pas commettre d’erreurs fatales telles que des coups d’État, des élections bâclées ou des conflits armés.