PS : présidentielle 2012, tous à la manoeuvre !

Strauss-Kahn, Aubry, Hollande, Royal, Valls, Montebourg… La liste des candidats, potentiels ou déclarés, à la primaire socialiste en vue de la présidentielle de 2012 ne cesse de s’allonger. Et les intrigues d’appareil battent leur plein.

Martine Aubry au Palais des Congrès de Paris, le 30 janvier dernier. © Chesnot / Sipa

Martine Aubry au Palais des Congrès de Paris, le 30 janvier dernier. © Chesnot / Sipa

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Publié le 31 janvier 2011 Lecture : 4 minutes.

Ira, ira pas ? Le « peuple de gauche » est suspendu aux lèvres du sphinx de Washington. À la vérité, le « peuple de droite », aussi : à tort ou à raison, il voit en lui la seule menace sérieuse pour Nicolas Sarkozy lors de la présidentielle de 2012. C’est « l’imam caché », persifle son camarade (?) Henri Emmanuelli, le député des Landes, qu’on ne savait point versé dans la théologie chiite.

Contractuellement tenu à un mutisme absolu concernant la politique française par ses fonctions de directeur général du FMI, Dominique Strauss-Kahn (DSK) fait de cette obligation professionnelle un atout politique. D’abord, parce que cet éloignement contribue à sa popularité : l’absent conserve son aura (presque) intacte et minimise le risque de s’aliéner par quelque bévue une opinion par nature versatile. Ensuite, parce que le mystère entretenu sur ses intentions oblige ses rivaux socialistes, potentiels ou déclarés, à se déterminer par rapport à lui. Il leur impose son tempo et son calendrier. Du coup, chacun scrute à la loupe la moindre de ses déclarations, s’efforce de reconstituer son agenda, interprète jusqu’à ses silences…

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Ecrans de fumée

« Il y a ceux qui l’attendent pour le cartonner ; ceux qui l’attendent pour se servir de lui comme d’un faire-valoir ; et ceux qui l’attendent sincèrement », commente François Patriat, l’un de ses proches. Certains (Pierre Moscovici) suggèrent qu’ils seront candidats si DSK s’abstient. D’autres (Benoît Hamon), qu’ils le seront s’il ne s’abstient pas. Intox, manœuvres dissuasives, écrans de fumée et billard à trois bandes : les socialistes s’en donnent à cœur joie.

Le mandat de Strauss-Kahn à Washington s’achève officiellement à l’automne 2012. Pour pouvoir briguer la présidence de la République, au mois de mai précédent, il lui faudra donc démissionner du FMI. Reste à savoir quand. C’est tout le sens des controverses sur la date de la primaire socialiste, finalement tranchées, le 11 janvier, par un aréopage réuni par Martine Aubry, la première secrétaire : dépôt des candidatures du 28 juin au 13 juillet ; primaire les 9 et 16 octobre.

Le prochain sommet du G20 (actuellement présidé par la France) se tiendra pour sa part les 3 et 4 novembre à Cannes. Il est censé marquer une étape importante du processus de régulation de la finance mondiale engagé sous l’égide du FMI. DSK considère-t-il que sa mission à Washington sera alors, pour l’essentiel, achevée ? Et que ce sera le bon moment pour se lancer dans la course à l’Élysée ? Le scénario n’est pas invraisemblable. S’il faut en croire, une nouvelle fois, Patriat, « le vrai terme du mandat [de DSK], c’est après le G20. C’est à ce moment-là que s’ouvrira le dossier de sa succession à la tête du FMI ».

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Au cours de l’été 2008, dans le riad du couple DSK-Anne Sinclair à Marrakech, un pacte de non-agression a été conclu avec Aubry. Les grandes lignes en sont connues : si le patron du FMI, toujours en avance dans les sondages en dépit d’un récent fléchissement, renonce à briguer la présidence, la première secrétaire aura le champ libre pour jouer sa propre carte, avec le soutien de son allié. Dans le cas contraire, elle s’abstiendra de se présenter. Mais on conçoit qu’elle souhaite savoir rapidement sur quel pied danser. Or elle n’est manifestement pas même assurée que DSK ait pris une décision – quelle qu’elle soit ! Entre eux, les tiraillements sont désormais perceptibles.

Bien entendu, les autres prétendants ont vite flairé le piège, ourdi avec la complicité de plus en plus manifeste de Laurent Fabius. Au fil des années, l’ex-favori de François Mitterrand est devenu un redoutable faiseur de rois. Après avoir beaucoup contribué à l’improbable victoire d’Aubry lors du congrès de Reims, en novembre 2008, il ferraille désormais, avec l’habileté qu’on lui connaît, sous la bannière strauss-kahnienne.

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Finaliste malheureuse contre Sarkozy en 2007, Ségolène Royal n’a, en dépit de dénégations réitérées, à aucun moment abandonné l’idée d’être à nouveau candidate : Dieu sait pourquoi, elle se sent porteuse d’un destin national. Davantage, en tout cas, que ses rivaux. Convaincue que DSK « n’ira pas », elle a, dans un premier temps, feint d’oublier – à défaut de pardonner – les tricheries du congrès de Reims. Puis de se réconcilier avec « Martine ». La ficelle était un peu grosse, mais qu’importe. Par la suite, elle a paru, deux jours durant, désireuse de s’associer au « pacte de Marrakech », comme la première secrétaire l’avait imprudemment annoncé, avant de se rétracter à la hâte, craignant, non sans raison, d’en être la dupe. Pour échapper à l’étau de la guerre de position que prétend imposer le camp DSK-Aubry-Fabius, elle a choisi le mouvement. Dès le début du mois de décembre, Royal a annoncé sa candidature et, depuis, multiplie sur à peu près tous les sujets les initiatives médiatiques parfois hasardeuses, mais qui traduisent une pugnacité, une détermination que ses rivaux auraient tort de sous-estimer. En novembre 2006, ne l’avait-elle pas emporté nettement sur Fabius et Strauss-Kahn ?

Outsiders à foison

Outre François Hollande, outsider miraculeusement remis en selle, qui, à l’époque où il dirigeait le PS, accepta à deux reprises (2002, 2007) de ne point s’engager dans la course présidentielle, et qui, dès lors qu’il en a perdu le contrôle, se déclare résolu à aller jusqu’au bout (voir ci-dessous), une nébuleuse d’étoiles de moindre grandeur ne désespère pas de jouer un rôle. Arnaud Montebourg, dont on ne sait s’il a fini de creuser les fondations de la VIe République, sa marotte, est officiellement candidat. Manuel Valls, le socialiste qui veut « déverrouiller les 35 heures » et n’hésite pas à braver la direction de son parti, aussi. Même Christian Pierret, un « social-démocrate modéré » qui se rêve en chantre de « l’innovation », s’est rangé sur la ligne de départ. D’autres devraient suivre. Et ça n’a aucune importance.

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