Guinée : sur les traces de Toumba Diakité

Repéré à Dakar, Toumba Diakité se fait discret. Mais, comme Dadis Camara, l’ex-chef de la junte qu’il a tenté de tuer, l’ancien militaire ne cache pas son envie de rentrer au pays.

Toumba Diakité, en octobre 2009. © AFP

Toumba Diakité, en octobre 2009. © AFP

Publié le 1 février 2011 Lecture : 3 minutes.

Les rumeurs les plus folles ont couru à son sujet. Certains le disaient mort sous les balles des soldats que le régime de Moussa Dadis Camara avait lancés à ses trousses. D’autres soutenaient que, lui, le capitaine qui avait tenté de tuer le chef de la junte en décembre 2009, avait succombé à un mal de ventre qu’il traînait depuis plusieurs années.

Mais début janvier, Aboubacar Diakité, dit Toumba, est sorti de son silence. C’est d’ailleurs lui qui a appelé Radio France Internationale (RFI) pour dire qu’il se portait bien et, surtout, qu’il souhaitait rentrer au pays. Hasard du calendrier – ou pas : quelques jours plus tôt, le 9 janvier, l’ancien chef de la junte, Dadis, avait lui aussi fait part, sur la même antenne, de son désir de quitter la Villa des hôtes de Ouaga 2000, où il est officiellement « en convalescence », pour rentrer en Guinée.

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En bon fugitif, Toumba Diakité est très discret sur son lieu de résidence. Mais selon nos informations, c’est à Dakar qu’il a refait surface, et c’est depuis une villa de Ngor, un quartier résidentiel de la capitale sénégalaise, qu’il s’est rappelé au bon souvenir des médias. La bâtisse, qui de l’extérieur paraît inoccupée, appartiendrait à un ressortissant guinéen et est encore inachevée.

Comment l’homme le plus recherché de Guinée a-t-il pu sortir de son pays, traverser la frontière, parcourir une bonne partie du Sénégal pour se retrouver à Dakar ? Qu’a-t-il fait depuis le début du mois de décembre 2009 ? S’il n’y a pas de réponse claire à cette interrogation, une piste se dégage : celle d’une ambassade occidentale en poste à Conakry et à Dakar, qui aurait couvert sa fuite et qui l’aurait hébergé avant que la villa de Ngor ne lui soit prêtée. Est-il toujours dans la capitale sénégalaise ? Rien n’est moins sûr. Toujours discret depuis qu’il est entré dans la clandestinité, Toumba Diakité a tout de même laissé entendre à certains de ses interlocuteurs qu’il s’était déjà rendu au Maroc. Est-ce parce qu’il a « trop parlé » qu’il ne se sent plus en sécurité à Dakar ? Se trouve-t-il aujourd’hui dans le royaume chérifien, comme le soupçonne fortement une de nos sources ?

"Je ne suis pas un paria !"

Une seule certitude : depuis la prise de fonctions du nouveau président guinéen, Alpha Condé, Toumba Diakité multiplie les coups de fil à ses proches, civils et militaires. Il leur demande d’intercéder en sa faveur pour que le nouvel homme fort de Conakry lui accorde la grâce et l’autorise à sortir de la clandestinité pour se réinstaller en Guinée. À l’un d’eux, il a lancé, la voix nouée de colère : « La Guinée ne doit pas me traiter de la sorte. Si je ne l’avais pas débarrassée de Dadis, elle n’aurait jamais connu la démocratie. Je dois être décoré et non pas traité comme un paria ! »

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Les chances de Toumba d’être entendu sont bien minces. Moussa Dadis Camara trépigne d’impatience et devient un hôte encombrant pour le président burkinabè, Blaise Compaoré. Il compte aussi des soutiens jusqu’au sein du gouvernement (Papa Koly Kourouma, un de ses proches, a été nommé au ministère de l’Énergie et de l’Environnement). Peut-on imaginer qu’il cohabite à Conakry avec celui qui a tenté de l’assassiner, sans que leurs fidèles respectifs s’affrontent ? Cela paraît assez peu vraisemblable. D’autant que Toumba est sous le coup d’une instruction judiciaire à Conakry pour cette tentative d’assassinat et qu’il est menacé de poursuites de la Cour pénale internationale pour son rôle dans le massacre du 28 septembre 2009. La fin de la clandestinité, ce n’est peut-être pas pour tout de suite.

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