Policiers sans frontières

D’un continent à un autre, d’un suicide suspect à un meurtre atroce, le dernier polar d’Alain Wagneur entraîne le lecteur jusqu’à Bamako, où le commandant Richard Zamanski mène l’enquête avec le commissaire Habib Keita et son adjoint Sosso, deux personnages de l’écrivain malien Moussa Konaté.

Le romancier français Alain Wagneur. © Vincent Fournier pour J.A.

Le romancier français Alain Wagneur. © Vincent Fournier pour J.A.

NICOLAS-MICHEL_2024

Publié le 27 janvier 2011 Lecture : 2 minutes.

D’un côté du monde, il y a Royan, ville française située sur l’estuaire de la Gironde et tournée vers l’océan Atlantique. De l’autre côté, il y a Bamako, partagé par les flots tranquilles du Niger. Ce qui relie les deux cités ? Des morts suspectes, des morts violentes, des morts atroces. Dans Djoliba, fleuve de sang, le romancier français Alain Wagneur met de nouveau en scène son commandant, Richard Zamanski, vaguement dépressif et placardisé à Blainville – nom sous lequel se cache Royan dans ce polar tendu entre la Charente-Maritime et le Mali.

Tout commence par le suicide d’un chercheur, Claude Parvillier, et la disparition de son ordinateur. Tout empire avec la mort d’un jeune étudiant noir, torturé. Tout se dénoue à quelques kilomètres de Bamako. En froid avec sa hiérarchie, invité à lâcher l’affaire, Richard Zamanski est plutôt du genre pugnace. Surtout lorsqu’il reçoit officieusement un feu vert venu du plus haut niveau de l’État. La piste qu’il renifle l’entraîne vers l’Afrique ? Qu’à cela ne tienne : il prend l’avion pour l’aéroport de Bamako-Sénou. 

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Souvenir de lecture

« Je ne suis pas africologue, je ne suis pas voyageur, je ne suis pas géographe, mais comme c’est le cas pour beaucoup de Français, j’ai de l’Afrique dans la tête », affirme Alain Wagneur. Il exagère un peu : c’est bien à l’occasion d’un voyage qu’a germé l’idée de Djoliba, fleuve de sang. En 2002, sa compagne, la romancière Pierrette Fleutiaux, était l’une des invitées du festival Étonnants Voyageurs dans la capitale malienne. Assistant aux débats, Alain Wagneur a été marqué par l’intervention d’un auteur ivoirien : « Il s’est élevé contre certaines traditions. Il ne plaisantait pas. Il avait peur. Il disait : “Nous tremblons pour nos enfants, nous craignons qu’ils se fassent enlever et soient victimes de sacrifices rituels.” »

De retour en France, Alain Wagneur a bâti son polar en utilisant souvenirs personnels, faits divers – en particulier l’affaire de l’Arche de Zoé –, images et lectures.

Mais la plus belle trouvaille de ce livre franco-malien est purement littéraire. C’est la rencontre entre le commandant Zamanski et deux policiers biens connus des amateurs de polar africain : le commissaire Habib Keita et son adjoint Sosso. Alain Wagneur s’est en effet permis d’emprunter ses personnages au romancier Moussa Konaté (La Malédiction du lamantin). « Cette idée-là, je la dois à un souvenir de lecture : les histoires où Maurice Leblanc met en scène Arsène Lupin et Herlock Sholmès, inspiré du Sherlock Holmes de Conan Doyle. En Afrique, Zamanski est un touriste. J’avais besoin d’Habib Keita et de Sosso pour mener l’enquête ! J’ai demandé l’autorisation à Moussa Konaté, qui a accepté, et m’a dit avoir retrouvé l’esprit de ses personnages dans mon livre. »

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La mâle amitié entre Zamanski et Keita, ainsi que le réalisme mâtiné de fatalisme des limiers de Konaté apportent d’ailleurs au roman de Wagneur un certain optimisme. Au-delà d’un dénouement qui soulève le cœur, reste en effet ce leitmotiv, réponse de Léopold Sédar Senghor à René Dumont : « L’Afrique noire est peut-être mal partie… Il n’empêche, elle est partie. »

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