Mauritanie : du béton, en attendant l’or
L’État donne la priorité aux infrastructures qui manquent dans tous les secteurs. Si la production est au rendez-vous, la prochaine étape sera la redistribution des recettes tirées de l’exploitation de l’or.
Mauritanie : chronique d’une nation
Les Mauritaniens ont surnommé Mohamed Ould Abdelaziz le « président du béton ». L’arrivée à Nouakchott le confirme. Entre l’aéroport et le centreville, l’avenue Nasser s’est élargie en « deux fois trois voies ». Plus loin, le boulevard Kennedy est en travaux. Dans le Sud, le long du fleuve Sénégal, ouvriers chinois et locaux s’activent à réaliser le dernier tronçon de la route goudronnée Rosso-Boghé. Le projet a été élaboré avant l’arrivée d’« Aziz » au pouvoir, mais vient de reprendre après une suspension due au gel de la coopération de l’Union européenne, l’un des bailleurs, à la suite du coup d’État d’août 2008.
Si le chantier est mis au crédit d’Aziz, c’est que ce président consacre une bonne partie de son temps à poser des premières pierres et couper des rubans. En novembre, il a inauguré les installations de l’Aftout Essahli, vieux projet enfin abouti qui permet d’approvisionner Nouakchott en eau potable. Quelques jours plus tôt, à 900 km de là, dans la région du Hodh el-Gharbi, il lançait les travaux de la ville nouvelle de Thermessa, qui doit être livrée dans huit mois. Budget : 442 millions d’ouguiyas (1,2 million d’euros). Il s’agit de « mettre en place des infrastructures de base qui manquaient au pays », explique le ministre du Développement et des Affaires économiques, Sidi Ould Tah. Pourtant, le secteur privé ne voit pas ces investissements d’un bon œil. Le marché de l’avenue Nasser, à Nouakchott, est revenu à ATTM, filiale de la Société nationale industrielle et minière (Snim), dont l’État est actionnaire.
« Les hommes d’affaires sont convaincus qu’Aziz veut les sortir du circuit », dit un opérateur économique. « ATTM était l’entreprise la plus performante pour ce chantier », se défend Sidi Ould Tah.
Entrepreneurs inquiets
Quand Maaouiya Ould Taya était au pouvoir, les marchés publics revenaient à un petit cercle de conglomérats privés qui ne les exécutaient pas toujours. On prête à Aziz l’ambition de rompre avec ces habitudes. Reste que les hommes d’affaires se disent inquiets. L’accroissement de la pression fiscale n’est pas non plus pour plaire. La perception de l’impôt s’est en effet améliorée, les recettes fiscales passant de 106 à 128 milliards d’ouguiyas de 2009 à 2010.
Parmi les perspectives positives : la croissance, morose en 2009 (1,1 %), devrait s’établir à 5,5 % pour 2010 et se maintenir au même niveau en 2011. Quant à la mine d’or de Tasiast, sa production devrait être multipliée par cinq ces trois prochaines années (contrairement à celle du pétrole, qui stagne à 8 000 barils/jour). Son exploitant, le canadien Kinross, promet d’investir 1,5 milliard de dollars (1,1 milliard d’euros). Une richesse dont aimeraient profiter les Mauritaniens, actuellement confrontés à une hausse du coût des produits de première nécessité, importés, et dont le commerce n’est pas encadré par un observatoire des prix.
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