Des signes et des lettres

Le plasticien tunisien Nja Mahdaoui réinvente la calligraphie en dépouillant les lettres de leur signification. Un art qui jouit d’un regain d’intérêt.

Ghubar Carré n°3, encre de chine et peinture acrylique sur peau, 40X40 cm. © Nja Mahdaoui

Ghubar Carré n°3, encre de chine et peinture acrylique sur peau, 40X40 cm. © Nja Mahdaoui

Publié le 22 décembre 2010 Lecture : 2 minutes.

Des lettres mais pas de mots. Des signes mais pas de sens. Nja Mahdaoui « utilise les signes arabes pour leur beauté esthétique », pas pour ce qu’ils représentent. « J’ai libéré la lettre de sa signification », explique le plasticien tunisien à l’occasion de la présentation de sa dernière collection, à Paris, début décembre.

Sur des toiles de lin, des peaux et des sérigraphies, Nja Mahdaoui, petit homme énergique de 73 ans, artiste passionné par toutes les disciplines du signe, a soigneusement évité les mots – une approche qui lui a été reprochée par quelques puristes de la calligraphie. Mais Mahdaoui est plasticien. Il n’a pas fréquenté l’une des célèbres écoles de calligraphie classique qui entretiennent, d’Istanbul à Tunis, cette tradition graphique née au VIIe siècle avec la naissance de l’islam. La calligraphie fut l’art d’écrire de manière stylisée le Coran, avant de s’inviter dans les documents administratifs et d’autres champs non religieux de la langue.

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Plume de roseau

Depuis les années 1980, la calligraphie classique jouit d’un regain d’intérêt, tandis que les artistes contemporains s’en sont également emparés. Les outils d’écriture se multiplient aux côtés du traditionnel calame – une plume de roseau –, et la couleur explose, comme chez Nja Mahdaoui, alors qu’elle est peu présente dans la calligraphie classique. D’autres artistes contemporains, à l’instar de l’Iranien Charles Hossein Zenderoudi, utilisent les lettres arabes dans leurs œuvres sans qu’elles composent pour autant des mots ou des phrases.

« Depuis quatre ou cinq ans, les œuvres contemporaines qui recourent à la calligraphie commencent à être visibles et à bien se vendre, explique Daniel Goldmann, le galeriste qui a exposé Nja Mahdaoui à Paris. La tradition arabe d’art non figuratif revient en force, et les expositions organisées dans le Golfe par des maisons de vente aux enchères londoniennes circulent à présent ailleurs. »

Pour Mahdaoui, juré à la biennale internationale de calligraphie arabe de Sharjah, aux Émirats arabes unis, « il faut permettre aux jeunes créateurs d’aller avec la lettre vers d’autres matériaux ». À Sharjah, une école de calligraphie classique et un musée d’art contemporain ont ouvert l’un en face de l’autre. Mahdaoui a contribué à leur interaction. « S’ouvrir à d’autres disciplines et à d’autres alphabets, c’est l’avenir de la calligraphie », s’enthousiasme-t-il.

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Ghubar Carré n°3, encre de chine et peinture acrylique sur peau, 40X40 cm.

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© Nja Mahdaoui

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