Race et esclavage

Publié le 27 décembre 2010 Lecture : 2 minutes.

Au détour d’un de ces zappings frénétiques auxquels nous sommes condamnés certains soirs, espérant découvrir l’ombre d’une émission palatable, je suis tombé sur un reportage narrant le triste destin de certains rois des stades. Comme ce jeune espoir du basket français condamné pour avoir tué sa mère qui l’avait détruit en lui imposant, depuis son plus jeune âge, des rapports incestueux. Puis il y a eu, aux antipodes du destin de ce garçon, celui de l’ancien joueur du Paris-Saint-Germain, Godwin Okpara, qui entretenait dans sa villa des Yvelines une esclave domestique et sexuelle qu’il aurait « achetée » à 375 euros TTC. Même s’il est aussi dit que le père de l’infortunée la lui aurait donnée comme fille adoptive après la mort de sa mère, espérant ainsi lui assurer une vie meilleure. Pensez donc ! Durant les quatre années qu’elle a passées au sein du couple, elle a dormi sur un matelas dans la cave. Quand la femme d’Okpara découvre la relation pédo-incestueuse, au lieu d’en blâmer ce dernier, elle inflige plutôt des sévices inhumains à la fille, allant jusqu’à lui taillader le sexe.

Je voudrais sensibiliser chacun sur le peu de bruit qui est fait par l’élite africaine sur cette forme d’esclavage. En France, de nombreux couples africains ont des esclaves dans leurs résidences. J’ai moi-même connu des amis, souvent étudiants, à qui l’on en avait offert comme cadeau de mariage. Je me suis souvent étranglé en de vaines critiques, ne trouvant jamais le courage de franchir le pas de la dénonciation citoyenne. Nous savons que la pratique est courante au Bénin, ou encore au Togo. Je me souviens de ce reportage qui montrait des enfants achetés en Afrique de l’Ouest dans le but de les envoyer au fond de l’eau, comme ces cormorans domestiques de Chine, pour qu’ils remontent avec du poisson. Je pense tous les jours aux restaveks d’Haïti.

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Mais je me dis surtout que cet esclavage pratiqué au vu de tout le monde est moins condamné que celui de la Mauritanie, l’un des rares États qui, à ma connaissance, a aussi clairement banni l’esclavage et criminalisé les esclavagistes. Comme je porte un intérêt particulier à ce pays, j’ai obtenu d’accompagner une délégation officielle de l’ONU pour observer le gros travail qui y est fait pour éradiquer les séquelles de l’esclavage. Il suffit que le premier pékin venu crée une association hybride qui « dénonce » l’esclavage mauritanien pour se voir ouvrir tous les cénacles et les subventions qui vont avec. Pourquoi cette différence de traitement ? Tout simplement parce qu’en Mauritanie l’esclavage aurait été pratiqué par des Blancs maures sur des Noirs, alors que dans les pays voisins la pratique n’obéissait pas au clivage de la couleur.

La pratique de l’esclavage n’a jamais été une question de couleur. Les Blancs l’ont fait entre eux et les Noirs aussi. J’ose espérer que les formes d’esclavage modernes sont aussi condamnables que la traite et que nous allons nous y mettre avec un peu plus d’entrain, au moins autant que celui que nous mettons pour commémorer et condamner des traites abolies depuis des siècles. J’entends déjà le cliquetis des armes de ceux qui vont crier haro sur le révisionniste. Ne vous gênez pas ! Je suis au moins aussi résistant qu’un baudet.

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