Laurent Gbagbo : quand les derniers amis vous quittent…

Ils ne sont plus guère nombreux à défendre le cas Gbagbo. La détermination des présidents Obama, Sarkozy, Compaoré et Jonathan… a fait plier ceux qui hésitaient encore.

Au sommet de la Cedeao, le 7 décembre, Goodluck Jonathan a mené la charge contre Laurent Gbagbo. © Reuters

Au sommet de la Cedeao, le 7 décembre, Goodluck Jonathan a mené la charge contre Laurent Gbagbo. © Reuters

Christophe Boisbouvier

Publié le 20 décembre 2010 Lecture : 2 minutes.

Samedi 4 décembre. « Investiture » de Laurent Gbagbo au palais. Tous les ambassadeurs en poste à Abidjan – sauf deux, ceux de l’Angola et du Liban – boycottent la cérémonie. Aussitôt, le pensionnaire du palais comprend qu’il doit desserrer l’étau. Dès le lendemain, il envoie discrètement son conseiller militaire, Bertin Kadet, chez son allié le plus fidèle, le président angolais José Eduardo dos Santos. Malgré l’embargo, les forces loyalistes doivent s’équiper au plus vite.

Le même jour, Laurent Gbagbo dépêche Zacharie Séry Bailly en Afrique de l’Ouest. Professeur d’anglais à Cocody, Séry Bailly n’a pas du tout la même feuille de route que Bertin Kadet. Au Nigeria, au Bénin, au Togo et au Ghana, il est chargé d’amadouer quelques pays clés de la sous-région avant le sommet de la Communauté économique des États de l’Afrique de l’Ouest (Cedeao), prévu le 7 décembre à Abuja. Au Nigeria, il n’est reçu que par des sous-fifres… Mauvais signe. Surtout, quelques jours plus tôt, le 2 décembre, le ministre nigérian des Affaires étrangères, Henry Odein Ajumogobia, a vu longuement Blaise Compaoré à Ouagadougou. Pour Laurent Gbagbo, le risque d’un axe Burkina-Nigeria contre son coup de force électoral se profile.

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Les « grands » en action

Lundi 6 décembre. Laurent Gbagbo espère encore pouvoir compter sur deux alliés dans la sous-région : le Ghana et le Cap-Vert. Mais les « grands » entrent en action. Barack Obama fait savoir à John Atta-Mills, son hôte de juillet 2009, que celui-ci ne peut pas le décevoir. Nicolas Sarkozy demande au président de la Commission européenne, José Manuel Barroso, de passer un petit coup de fil à Pedro Pires, son vieil ami lusophone, pour lui rappeler combien l’Europe a contribué au développement de son archipel…

Mardi 7 décembre. Le chef de l’État nigérian, Goodluck Jonathan – qui préside la Cedeao –, est pressé d’en finir. Pour gagner du temps, il organise le sommet au pavillon d’honneur de l’aéroport d’Abuja. Six de ses pairs d’Afrique de l’Ouest ont répondu à l’invitation : le Sénégalais Abdoulaye Wade, le Malien Amadou Toumani Touré, la Libérienne Ellen Johnson-Sirleaf, le Burkinabè Blaise Compaoré, le Ghanéen John Atta-Mills et le Togolais Faure Gnassingbé. Petite surprise : le représentant spécial de l’ONU en Côte d’Ivoire, Choi Young-jin, vient expliquer pourquoi il a certifié la victoire d’Alassane Ouattara. Les sept approuvent. Huis clos, déjeuner. En quatre heures, le sort de Gbagbo est scellé : « Laurent Gbagbo doit rendre le pouvoir sans délai. » La Côte d’Ivoire est suspendue. Réaction du journal Notre Voie, à Abidjan : « C’est le sommet des comploteurs. »

Mercredi 8 décembre. Après l’Afrique du Sud, la Russie lâche à son tour le camp Gbagbo. Est-ce l’effet d’un coup de téléphone de Nicolas Sarkozy à Dmitri Medvedev ? Plus sûrement, Moscou ne veut pas se fâcher avec le grand Nigeria. Le lendemain, l’Union africaine annonce la suspension de la Côte d’Ivoire. À Abidjan, Alcide Djédjé, le nouveau ministre des Affaires étrangères de Laurent Gbagbo, peut fulminer contre « l’ONU à la dérive ». Mais quand il sollicite une audience chez Blaise Compaoré, celui-ci fait répondre que son emploi du temps est trop chargé… 

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