Vers un remaniement d’ouverture ?
À l’approche des législatives, tout est possible. Les jeux d’alliance peuvent-ils provoquer un remaniement gouvernemental d’ouverture en direction du chef de l’UPG ou ses proches ?
Ali Bongo Ondimba l’avait promis : lui élu, il n’y aurait plus de marchandages entre pouvoir et opposition pour les postes au gouvernement. Il voulait bousculer les usages naguère en vigueur sous la présidence de son père ; le voilà rattrapé par le principe de réalité. Le président du Gabon n’est pas loin de céder à ceux qui, à l’instar de l’Élysée, le pressent d’admettre l’opposition au sein du gouvernement. Le 27 septembre donc, le chef de l’État a profité d’un court séjour à Paris pour rencontrer l’opposant Pierre Mamboundou, 64 ans, qui luttait alors contre la maladie à l’hôpital parisien du Val-de-Grâce. Si rien n’a filtré de ce tête-à-tête, les Gabonais pressentent néanmoins que de grands bouleversements pourraient survenir.
Le loup dans la bergerie
De retour à Libreville le 21 novembre, Mamboundou, qui aime à cultiver le mystère, a confirmé à demi-mot ce qui se trame depuis des semaines : « Pour tout ce qui va se passer à partir de maintenant, j’espère avoir le soutien de tous les Gabonais et particulièrement des militants de l’UPG [Union du peuple gabonais, son parti, NDLR] et de l’ACR [Alliance pour le changement et la restauration, coalition de partis qui a soutenu sa candidature à la présidentielle]. Et je pense que dans quelques jours nous serons fixés sur tout ce qui s’est passé avant que je ne sois à Paris et après mon retour dans notre pays », a-t-il poursuivi, énigmatique.
Ainsi donc, le scénario de l’entrée de l’UPG au gouvernement n’est pas encore entièrement écrit. Au bout de plusieurs décennies d’opposition frontale, ce serait une grande première mais, paradoxalement, pas une surprise. Un premier pas a été fait le 17 novembre 2009 avec la nomination de l’ancien porte-parole du parti Jean Félix Mouloungui comme ministre des PME au sein du gouvernement de Paul Biyoghé Mba.
La vraie nouveauté serait que Mamboundou obtienne la primature, qu’il a toujours convoitée. Ce serait la fin de la répartition « géopolitique », en vigueur depuis quatre décennies, qui réservait ce poste à un Fang de la région de l’Estuaire. « Pour le parti au pouvoir, c’est moins significatif que de faire entrer le loup Mamboundou dans la bergerie de la majorité présidentielle », relativise un homme politique.
L’exercice, il est vrai, est compliqué pour le président. Il doit rassurer les caciques de son parti, qui craignent d’être les grands perdants d’une recomposition de leur famille politique. D’autant que trop de questions restent sans réponse. Qu’adviendrait-il en effet des ténors du Parti démocratique gabonais (PDG) dans une nouvelle nomenclature qui intégrerait Mamboundou en chef du gouvernement ? Et dans cette hypothèse, comment justifier que les quatre premières personnalités de l’État seraient toutes issues du Grand Sud (c’est déjà le cas du président de la République, du président de l’Assemblée nationale et du président du Sénat) ?
Torpiller les coalitions
À moins qu’Ali Bongo Ondimba ne parvienne à obtenir à moindres frais un ralliement de l’opposant, en lui offrant le fauteuil toujours vacant de vice-président de la République. Même s’il est probable que le fier et altier Mamboundou voudra négocier un élargissement du périmètre de ses attributions…
Manifestement, dans la perspective des législatives de 2011, le président veut torpiller les deux blocs qui menacent la majorité au Parlement, à savoir la coalition constituée autour de l’Union nationale et celle de l’ACR cornaquée par l’UPG.
Cependant, s’il entre au gouvernement, l’ancien maire de Ndendé sait d’avance à quels anathèmes l’expose ce changement de cap. S’il peut sortir indemne des turbulences au sein de son parti, où son leadership est incontesté, le risque est grand de voir imploser la coalition qu’il dirige.
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