Coup de torchon à la Fifa
Après la publication d’une enquête dans le Sunday Times, plusieurs membres du comité exécutif ont été suspendus de leurs fonctions pour « manquement au code éthique ». Parmi eux, quatre Africains.
Le scandale ne pouvait plus mal tomber pour la world company du football. Le 17 octobre, le Sunday Times révélait que plusieurs membres de la Fifa étaient prêts à vendre leurs voix lors du vote pour l’attribution de la Coupe du monde 2018, le 2 décembre suivant, à Zurich. Des journalistes se faisant passer pour des lobbyistes travaillant pour les États-Unis (lesquels ont, depuis, retiré leur candidature pour se concentrer sur l’édition 2022) avaient piégé, parfois en caméra cachée, des membres éminents de l’institution.
Le Nigérian Amos Adamu et le Tahitien Reynald Temarii, l’un et l’autre membres du comité exécutif, se sont fait prendre la main dans le sac. Le premier réclamait 570 000 euros – officiellement destinés au financement de quatre terrains synthétiques dans son pays – pour prix de son appui. Et le second, 1,6 million pour l’ouverture d’une académie du sport à Tahiti. À quelques jours du grand raout zurichois, la Fifa se devait de réagir. D’abord suspendus de toute fonction officielle à titre conservatoire, les deux hommes le sont désormais de façon ferme. Adamu pour trois ans, Temarii pour un an.
Par ailleurs, quatre autres responsables se sont vu interdire temporairement d’exercer une quelconque activité liée au football. Ils devront en outre acquitter une amende de 7 400 euros. Slim Aloulou (Tunisie) restera sur la touche pendant deux ans, Amadou Diakité (Mali) et Ahongalu Fusimalohi (Tonga) pendant trois ans, et Ismaël Bhamjee (Botswana) pendant quatre ans. Mais la Fifa n’a pu résister à la tentation de se payer les médias anglais, accusés « d’avoir fait des constructions et du sensationnel », comme l’a déclaré sans rire Claudio Sulser, président de la commission d’éthique.
L’un parle, l’autre pas
Depuis l’annonce du verdict, les sanctionnés ont adopté des stratégies diverses. Adamu (57 ans) a nié en bloc les informations du Sunday Times et ne s’est plus exprimé depuis. Directeur du développement du sport au Nigeria, il va être entendu par la police anticorruption de son pays. Ancien footballeur professionnel au FC Nantes, Temarii fut, de 1991 à 1997, conseiller du sénateur Gaston Flosse. Grand ami de Jacques Chirac, ce dernier fut le premier président de la Polynésie française – et, accessoirement, maintes fois mis en examen. Temarii souhaite « revenir à la Fifa » dès que possible, estime avoir été victime d’un trucage, se félicite de ne pas avoir été accusé de corruption et annonce son intention de faire appel.
Diakité se réfugie quant à lui dans un mutisme total. L’ancien président de la Fédération malienne de football (1992-2002) était en campagne pour reconquérir son fauteuil de membre exécutif de la Fifa. Selon ses proches, il envisagerait d’interjeter appel devant le Tribunal arbitral du sport (TAS). Mais à Bamako, les commentaires vont bon train. Un responsable du ministère des Sports estime par exemple que cette affaire « ternit l’image de l’ensemble des acteurs du football malien ».
À l’inverse, Bhamjee parle d’abondance. Lors de la Coupe du monde 2006, il s’était déjà fait piéger par des journalistes anglais en tentant de leur revendre des billets, ce qui lui avait valu d’être exclu du comité exécutif de la Fifa. Cette fois, il aurait raconté aux journalistes du Sunday Times qu’en 2004 le Maroc, alors candidat à l’organisation de la Coupe du monde 2010, s’était assuré moyennant finances les voix de trois membres africains du comité exécutif. L’hebdomadaire britannique cite les noms d’Issa Hayatou (par ailleurs président de la Confédération africaine de football, CAF), Amadou Diakité et Slim Aloulou. Bhamjee nie catégoriquement.
Depuis Tunis, Aloulou, soutenu par plusieurs médias, se déclare « fier d’avoir été blanchi des accusations de corruption ». Ancien président de la Fédération tunisienne de football et ancien gouverneur de Bizerte et Kairouan, il fut membre du comité exécutif de la CAF avant d’être bombardé président de la chambre de résolutions des litiges et membre de la commission du statut du joueur à la Fifa. Comme les autres, il lui faudra patienter quelques années avant de retrouver les hauteurs de Zurich.
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