Wade et le palais volant
L’achat probable, par Dakar, d’un des deux airbus présidentiels français mis en vente, fait les choux gras de la presse sénégalaise.
Voilà l’un des deux Airbus A319 de la flotte présidentielle française pris dans le tourbillon d’une polémique sénégalaise. Acheté flambant neuf par Jacques Chirac en 2002, il serait en passe d’être cédé pour 32 millions d’euros au président Abdoulaye Wade.
Drôle de destin pour cet appareil qui a pris sa retraite le 11 novembre, quand Nicolas Sarkozy a étrenné son nouvel A330 à l’occasion du G20 en Corée du Sud. Car personne ne semble en vouloir à Dakar. L’information, qui a fuité de l’Élysée, fait les choux gras de la presse locale.
« C’est une dépense qui n’est autorisée ni dans le budget 2009 ni dans celui de 2010 », objecte Ibrahima Sène, du Parti de l’indépendance et du travail.
Harcelé par la presse, Abdoulaye Diop, le ministre de l’Économie et des Finances, dément, le 13 novembre : l’avion, dit-il, n’a pas encore été acheté, « le ministère des Forces armées n’en est qu’au stade des pourparlers ».
À Paris, l’Élysée, Matignon et le ministère de la Défense se renvoient la balle. Quoi qu’il en soit, la transaction se négocie exclusivement entre militaires.
Privé depuis 2007 de son avion (La Pointe de Sangomar, acheté en 1978 par Senghor) à la suite d’une fissure apparue en plein vol sur un hublot, Abdoulaye Wade ferait pourtant une affaire. « Cet Airbus est en bon état et vendu au juste prix », affirme un connaisseur bien informé. Le marbre et l’épaisse moquette, assortie au cuir des fauteuils, ont résisté au temps, et l’appareil est resté un petit palais volant. À l’arrière, un grand salon, qui compte plusieurs rangées de fauteuils style business class. Puis, séparés par des rideaux, deux petits salons. Dans l’un d’eux, des tables peuvent être dressées pour une dizaine de convives. Viennent ensuite la chambre présidentielle et la salle de bains. Le tout dans des tons de beige.
Sera-t-il au goût de Gorgui (« le vieux », en wolof) ? Le chef de l’État sénégalais n’aura plus qu’à le repeindre aux couleurs du pays et à ajouter sa touche personnelle. Se contentera-t-il de changer la moquette et d’installer internet, dont ne dispose pas cet appareil ? Ou souhaitera-t-il ajouter des gadgets, voire des dorures ? La facture pourrait alors flamber, et continuer d’alimenter la controverse. La France se montrera peut-être plus discrète lors de la vente de son second A319, qui, dit-on, intéresse aussi bien des États que des acheteurs privés.
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