Rapport : jusqu’à 1400 milliards de dollars sortis d’Afrique en trente ans

Selon un rapport publié conjointement par la Banque africaine de développement et l’ONG Global Financial Integrity, le déficit net de ressources et les fuites illégales de capitaux depuis trente ans compromettent le développement du continent.

Le siège temporaire de la Banque africaine de développement, à Tunis. © DR

Le siège temporaire de la Banque africaine de développement, à Tunis. © DR

ProfilAuteur_FredMaury

Publié le 30 mai 2013 Lecture : 2 minutes.

Entre 1980 et 2009, les sorties nettes de capitaux du continent africain ont atteint entre 597 et 1 400 milliards de dollars (1 000 milliards d’euros), estime un rapport conjoint de la Banque africaine de developpement (BAD ) et  l’ONG américaine Global Financial Integrity (GFI). Rendu public le 29 mai lors des Assemblées annuelles de la BAD, qui se déroulent jusqu’au 31 mai à Marrakech, ce document, baptisé « Les flux financiers illicites et le problème des transferts nets de ressources en provenance d’Afrique : 1980-2009 », vient contredire l’idée généralement reçue selon laquelle le continent profiterait de la générosité occidentale… « L’idée reçue a toujours été que l’Occident injecte de l’argent en Afrique, grâce à l’aide étrangère et aux autres flux de capitaux du secteur privé, sans recevoir grand-chose en retour. Notre rapport inverse le raisonnement : l’Afrique est en situation de créancier net par rapport au reste du monde depuis des décennies », a déclaré Raymond Baker, directeur du centre de recherche et de défense GFI, basé à Washington. « La fuite des ressources hors de l’Afrique au cours des trente dernières années – quasi l’équivalent du PIB actuel de l’Afrique – freine le décollage du continent », a déclaré Mthuli Ncube, économiste en chef et vice-président de la BAD.
 
Selon le rapport, les flux financiers illicites représenteraient l’essentiel de ses montants, sans doute au-delà des 1000 milliards de dollars entre 1980 et 2009. Mais l’evaluation reste complexe. « Nous avons utilisé quatre méthodologies différentes pour mesurer ces flux illicites, ce qui explique la différence importante entre le niveau bas et le niveau le plus haut de notre estimation », souligne Raymond Baker, interrogé par Jeune Afrique en marge des Assemblees annuelles. GFI et la BAD ont ainsi utilisé les desequilibres dans les balances de paiement mais aussi les différences dans les statistiques commerciales entre les pays, mesurées par le FMI. « Lorsqu’un pays fait état de 100 milliards de dollars d’exportations vers un autre pays, tandis que ce dernier enregistre 200 milliards d’importations venant de son partenaire, il y a une différence de 100 milliards qui ont disparu », illustre Raymond Baker.
Transparence
Pour lutter contre ce phénomène de sorties illicites, plusieurs pistes sont envisagées. En plus de veiller à l’application stricte des réglementations anti-blanchiment déjà en vigueur, le rapport préconise de demander aux banques et aux paradis fiscaux de fournir régulièrement à la Banque des règlements internationaux (BRI) des informations détaillées sur les dépôts, qui précisent le secteur, l’échéance et le pays de résidence des détenteurs de comptes de dépôt. La BRI pourrait ensuite être autorisée à diffuser largement ces informations bancaires auprès des pays d’origine et de destination concernés.
Enfin, s’attaquer au problème posé par les sociétés écrans ainsi que les fondations et sociétés d’investissement est essentiel. La BAD et le GFI suggèrent de demander confirmation quant à la propriété effective de tous les comptes bancaires et valeurs mobilières, et exiger que les informations sur les vrais propriétaires physiques de toutes les sociétés soient divulguées au moment de leur constitution et disponibles dans des registres publics. « Ce qu’il faut, c’est la transparence », insiste Raymond Baker.

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