Présidentielle : Compaoré l’archifavori, archi-élu
Blaise Compaoré a été confortablement réinstallé dans son fauteuil dès le premier tour, dimanche 21 novembre. Aucun de ses opposants, dont Arba Diallo et Bénéwendé Sankara, n’a pas atteint le score de 10 %.
Il était une fois le Burkina…
Même le hasard le place en tête. Le 17 octobre, le tirage au sort pour définir le positionnement, sur le bulletin de vote, de chacun des sept candidats à l’élection présidentielle des 21 novembre et 5 décembre est allé dans le sens des pronostics : Blaise Compaoré a tiré le numéro 1. Il sera donc en première position sur le bulletin unique, et devant ses deux principaux outsiders : Arba Diallo (n° 2) et Bénéwendé Sankara (n° 3). À l’issue du scrutin de dimanche qui a sacré le président sortant avec près de 80 % des votes, le même podium a été reconduit.
Parmi les candidats, seuls Sankara et Diallo semblent en mesure de faire bonne figure. Les autres (Boukary Kaboré, dit le Lion, ex-compagnon de révolution de Thomas Sankara, François Kaboré, l’héritier de Joseph Ki-Zerbo, Maxime Kaboré, l’indépendant venu de Belgique, et Emile Paré) auront bien du mal à exister. Certains n’ont même pas cru bon de tenter leur chance, tels Zéphirin Diabré et Hermann Yaméogo, candidat malheureux en 2005.
Quelle opposition ?
Comme lors de ses précédentes campagnes, Compaoré s’est présenté en archifavori. En 1991, il n’avait pas d’adversaire. En 1998, il n’avait face à lui que deux candidats qualifiés de faire-valoir. En 2005, sur douze concurrents, aucun n’était en mesure de le battre (il avait recueilli 80,3 % des voix). Cette année, il a fait aussi bien, sinon mieux.
« L’élection est jouée d’avance, reconnaîssait Bénéwendé Sankara, le chef de file de l’opposition. Le parti au pouvoir compte 90 % des députés, il contrôle l’administration, l’armée et l’économie. » Même les chefs traditionnels sont, pour la plupart, dans le camp du président.
Mais si Compaoré ne s’est pas fait trop de souci, ce n’est pas seulement parce qu’il a verrouillé le système et que son statut de sortant lui a donné des moyens supérieurs à ses adversaires pour battre campagne. Ce n’est pas non plus parce que le bilan de son dernier mandat est positif ni parce qu’il a été soutenu par les deux partis les mieux représentés à l’Assemblée nationale : le sien, le Congrès pour la démocratie et le progrès (CDP), et l’Alliance pour la démocratie et la fédération/Rassemblement démocratique africain (ADF/RDA). C’est aussi parce que l’opposition a été désunie, comme toujours. « Tant qu’on aura 156 partis politiques et une société civile déstructurée, l’alternance sera impossible », constate Alidou Ouédraogo, membre du Collectif contre l’impunité.
Rendez-vous 2015 ?
En panne d’arguments, l’opposition en s’est contenté de dénoncer les ratés dans le processus d’inscription des électeurs, à la suite de la décision de nettoyer intégralement les listes. Selon la Commission électorale nationale indépendante (Ceni), seuls 3,2 millions de Burkinabè ont été inscrits. « C’est moins qu’en 2005 », a noté Sankara (il y avait alors 3,9 millions d’inscrits), « pourtant, il ne me semble pas que la population du pays ait baissé… »
Dans ce contexte, la campagne a eu bien du mal à démarrer. Si les favoris ont parcouru le pays depuis début novembre et enchaîné les meetings, les autres s’étaient contentés de faire du porte-à-porte. « Pourquoi dépenser tout son argent alors qu’on sait qu’on n’a aucune chance ? », maugrée un observateur indépendant.
Compaoré, lui, sûr de sa victoire, a pu se payer le luxe d’alterner meetings de campagne en chemise à son effigie et entreprises de médiation en Guinée, où il s’est rendu le jour même du lancement officiel de la campagne électorale. Dans son entourage, on pense déjà à 2015 et à la meilleure stratégie pour faire accepter aux Burkinabè la levée de la limitation du nombre de mandats présidentiels. Car le chef de l’État a beau être encore jeune – il fêtera ses 60 ans en février 2011, dont vingt-trois à la tête du pays –, la Constitution révisée en 2000 ne lui permet pas de se représenter.
« Dans d’autres pays, reconnus comme des démocraties, le nombre de mandats n’est pas limité. Pourquoi dans notre pays ce ne serait pas démocratique ? », souligne l’un des plus ardents militants d’une nouvelle révision de la Constitution, le président du CDP, Roch Marc Christian Kaboré, par ailleurs président de l’Assemblée nationale.
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