Dilma Rousseff

Présidente du Brésil

Dilma Roussef. © AFP

Dilma Roussef. © AFP

Publié le 9 novembre 2010 Lecture : 3 minutes.

Passée l’euphorie de la victoire, les difficultés commencent. Dilma Rousseff, 62 ans, devenue le 31 octobre la première femme présidente du Brésil, en a bien conscience. Certes, elle a remporté aisément le scrutin, avec 56 % des voix, mais elle n’a pas été élue dès le premier tour comme elle l’espérait. Et ses premiers défis sont de taille. Elle devra réformer un système éducatif mal en point, développer les infrastructures et améliorer le sort des quelque 30 millions de Brésiliens qui vivent dans la misère. Au menu également, l’organisation de la Coupe du monde de football de 2014, dont les travaux ont pris du retard, et celle des Jeux olympiques d’été de 2016. Surtout, Rousseff devra assurer la pérennité des plus grandes réussites de Lula da Silva, son prédécesseur et mentor : un rythme de croissance élevé (7,5 % prévus cette année) et la réduction des inégalités.

Se gardant de tout triomphalisme, la nouvelle présidente s’est donc engagée, dans un premier discours très sobre, à éradiquer la pauvreté, dont « la profondeur abyssale empêche [le Brésil] de devenir une nation développée », et à améliorer la qualité des services publics. En réalité, durant toute sa campagne, et à l’instar de son opposant de centre droit, José Serra, elle a entretenu le flou sur les politiques qu’elle entend mener. Une chose est sûre : le 1er janvier 2011, qui marquera le début de son mandat, elle se retrouvera seule à la barre de la huitième économie du monde et ne pourra plus compter sur l’immense popularité de Lula pour rallier les Brésiliens à ses choix.

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La terne Dilma, qui a mené une campagne sans brio, devra faire avec ses qualités propres : pugnacité et efficacité de gestionnaire. « Dilma ne sera pas un second Lula, prévient Roberto Mangabeira Unger, ancien ministre du président-syndicaliste. C’est une personne différente, qui arrive dans des circonstances différentes pour accomplir un mandat différent. » Plus dirigiste que Lula, Rousseff, ancienne égérie de l’extrême gauche, devrait accroître le rôle de l’État dans l’économie, en particulier dans l’exploitation des gisements de pétrole offshore découverts dans l’Atlantique. Sans cependant remettre en question les grands équilibres macroéconomiques. Elle a déjà indiqué qu’elle veillerait à la maîtrise des dépenses publiques. De quoi dissiper les craintes des marchés, qui sont d’ailleurs repartis à la hausse sitôt connus les résultats de l’élection.

Sur le plan social, Rousseff ne changera sans doute pas un Brésil religieux et conservateur. Après s’être déclarée, pendant la campagne, favorable à la dépénalisation de l’interruption volontaire de grossesse, elle s’est heurtée aux réactions indignées des clergés catholique et évangélique, et a dû s’engager par écrit à ne pas légaliser l’avortement au cas où elle serait élue.

Sur le plan international, le Brésil de Rousseff perdra certainement de la stature et de l’influence que lui avait fait gagner l’ambitieuse politique étrangère de Lula. « Dilma ne recherche pas le prestige. Peu lui importe d’être un dirigeant qui compte sur la scène internationale. Durant les premières années de son mandat, elle va surtout s’occuper de politique intérieure », indique Rubens Barbosa, ancien ambassadeur du Brésil à Washington, dans le New York Times.

Rousseff aura-t-elle les moyens de ses ambitions, aussi raisonnables soient-elles ? Ce n’est pas gagné. Même si elle devrait disposer d’une large majorité parlementaire – voire des 60 % des votes nécessaires pour amender la Constitution –, elle n’aura peut-être pas assez de poids pour imposer au Congrès tous ses projets de réforme économique. Autre casse-tête en perspective, la cohabitation harmonieuse des dix partis qui composent sa coalition.

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En outre, la présidente sera davantage otage du Parti des travailleurs que ne l’était Lula. L’intention qui lui est prêtée de nommer un gouvernement de technocrates – avec notamment Antonio Palocci, ministre des Finances sous Lula de 2003 à 2006 et partisan de l’orthodoxie budgétaire – inquiète déjà l’aile gauche du parti, qui pourrait radicaliser ses positions. L’inexpérimentée et peu charismatique Dilma n’aura que sa légitimité à lui opposer. Cela suffira-t-il ?

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