J’ai commencé à lire Jeune Afrique alors que j’étais encore élève au lycée Gaston-Berger de Kaolack, au Sénégal, à la fin des années 1960. Les numéros qu’un copain de classe libanais achetait passaient entre les mains de quelques privilégiés. Mai 1968 n’était pas loin. Le monde était alors en pleine guerre froide. Ceux qui se disaient gauchistes et révolutionnaires lisaient Afrique-Asie, les autres Jeune Afrique. Moi je lisais les deux, pour me faire une opinion équilibrée, mais je dois préciser que ma fidélité à J.A. n’a jamais fait défaut depuis.

Quand je me suis installé au Manitoba (Canada) en 1985, j’ai eu l’agréable surprise, en visitant une librairie de Saint-Boniface, d’y trouver mon magazine préféré. Je me rappelle avoir dit à l’époque à mon épouse : « Maintenant, je peux vivre ici car on trouve Jeune Afrique ! » Il convient de préciser qu’à l’époque les médias nord-américains ne faisaient référence au continent que pour évoquer guerres, maladies, cataclysmes et autres calamités, naturelles ou provoquées.

Je me souviens notamment d’articles publiés par J.A. en 1988 à propos du massacre des Kurdes à Halabja, pendant la guerre Iran-Irak, par l’armée de Saddam Hussein, qui était à l’époque le chouchou des Occidentaux. Aucun média d’ici ne faisait référence à ce massacre, J.A. a été le premier à couvrir cet événement douloureux. Ces atrocités, longtemps passées sous silence, ont finalement été utilisées à grand bruit par les va-t-en-guerre occidentaux en 1991, pour punir le despote de Bagdad qui avait envahi son voisin le Koweït. J.A. nous avait pourtant informés bien avant ! 

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