Reda Benjelloun et J.A. …
Directeur de l’information à 2M 44 ans, lit Jeune Afrique depuis toujours
Publié le 17 novembre 2010 Lecture : 1 minute.
À sa disparition, à la fin des années 1980, mon grand-père, modeste employé de banque et homme de grande culture, nous a légué une somme de valeurs et… une clé. Celle d’une pièce, où était entreposé un quart de siècle de l’histoire du Maroc et de l’Afrique. De sa vie, pas un jour sans qu’il ait lu Attahrir, puis Al-Moharrir et Al-Ittihad al-Ichtiraki (noms du quotidien de la gauche au gré des interdictions). Pas une semaine sans qu’il ait épluché, scrupuleusement, religieusement, Jeune Afrique. Lecture de riche ? Assurément : l’exemplaire d’Afrique Action, puis de J.A. valait son kilo de viande. Il aurait pu – en bon père de famille – le « louer », comme cela se pratique encore auprès de tous les kiosques africains. Mais non : l’avoir, le lire, le faire lire à ses petits-enfants était une promesse, chaque semaine renouvelée, de culture et d’appétit de l’autre.
Mon imaginaire d’enfant était peuplé de personnages aux patronymes exotiques : Ahidjo, Lumumba, Houphouët, Makeba, Kuti, Senghor, Achebe, Beti… À l’âge des premiers voyages, ma boussole m’indiquait Ouaga, Cotonou, Lagos, Dakar, Abidjan… À l’âge des premiers choix, le journalisme s’est imposé comme une impérieuse nécessité. Étudiant en droit à Paris, il m’arrivait de rôder du côté de la rue des Ternes et plus tard de la rue d’Auteuil. Pigiste occasionnel, l’important pour moi n’était pas tant d’être publié que de côtoyer, même furtivement, Marcel Péju, Sennen Andriamirado, Élimane Fall, Jacques Bertoin, Hamid Barrada… sans oublier les autres.
J’ai tant à dire et à médire… Mais je ne peux qu’être reconnaissant à J.A. et à BBY de m’avoir mis sur la piste de L’Aventure ambiguë, de Cheikh Hamidou Kane (voir p. 69). Depuis ce jour, comme le personnage de Samba Diallo, je me demande s’il est légitime de « vaincre sans avoir raison » ?
