Retraites : le syndicat des mécontents

Les syndicats français (CGT, CFDT, FO, CFTC, CGE-CGC, Unsa, FSU, Solidaires) ont décidé d’organiser, le 28 octobre et le 6 novembre, deux nouvelles journées d’action nationales – la septième et la huitième en deux mois – contre le recul de l’âge légal de la retraite de 60 à 62 ans.

Manifestation contre la réforme des retraites, à Paris, le 20 octobre. © Charles Platiau/Reuters

Manifestation contre la réforme des retraites, à Paris, le 20 octobre. © Charles Platiau/Reuters

ProfilAuteur_AlainFaujas

Publié le 27 octobre 2010 Lecture : 2 minutes.

Vu de l’étranger, le succès de ces manifestations est incompréhensible, tout comme le soutien de l’opinion, qui approuve à 59 % la poursuite du mouvement (sondage BVA-Absoluce du 20 octobre). Les uns après les autres, les pays développés ne repoussent-ils pas l’âge de la retraite pour équilibrer les comptes de leurs systèmes de pension ? Les spécificités françaises expliquent l’originalité de cette bataille qui surprend les observateurs.

Le thème : l’âge de la retraite. Les centrales syndicales sont idéologiquement très divisées. Les unes appartiennent à la tradition anarcho-­syndicaliste ou révolutionnaire, qui refuse tout réformisme, les autres plaident pour des négociations qui amélioreraient la situation des travailleurs. Leur seul point d’accord est le refus de se voir imposer par le président de la République un report de deux ans de l’âge de la retraite. En fait, la CFDT, l’Unsa, la CGE-CGC et une partie de la CGT ne demandent pas l’abandon pur et simple du projet. Ils critiquent sa forme, pas la nécessité d’une rénovation.

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La cible : le gouvernement. Aux Pays-Bas ou en Allemagne, les discussions sociales ne débouchent pas sur une contestation du pouvoir politique. En ­France, les syndicats ont pour habitude de faire pression sur ce dernier, d’une part pour faire avancer leurs revendications dans un pays très centralisé et, d’autre part parce qu’ils sont historiquement très politisés. Les conquêtes sociales ont le plus souvent été obtenues à l’issue de fortes mobilisations. Aujourd’hui, l’impopularité de Nicolas Sarkozy dope les manifestants.*

Le mode d’action : la confrontation. La France n’a pas la culture de la négociation. Quand patrons et syndicats négocient une réforme de la retraite en Europe du Nord, ils se parlent pendant deux ans. En France, le gouvernement a bouclé les discussions en quelques semaines. La réaction des centrales syndicales est d’autant plus dure que leurs troupes sont clairsemées. L’Hexagone possède l’un des taux de syndicalisation les plus faibles des pays développés : 7 %, contre 25 % en Allemagne et 87 % au Danemark. Surtout présents dans les services publics, les syndicats y utilisent essentiellement l’arme de la grève pour exercer une pression maximale sur le gouvernement, qu’une interruption des transports ou de l’école expose au mécontentement de l’opinion. Aujourd’hui, cette arme est émoussée, puisque Sarkozy espère que sa persévérance à imposer la réforme sera portée à son crédit par les électeurs en 2012.

La sortie de crise semble compliquée. Le président restera inflexible et ne fera pas un geste pour sauver la face des syndicats réformistes. Au moment des vacances de la Toussaint, la radicalisation de certains salariés, notamment dans le raffinage et la distribution de carburant, tout comme les actes de sabotage qui réapparaissent à la SNCF risquent de retourner une partie de l’opinion contre les protestataires.

Enfin, l’unité syndicale est fragile, et il faudra surveiller l’évolution des relations entre les deux principales organisations, la CGT et la CFDT, l’une tentée par l’action, l’autre par le dialogue. 

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