Aqmi : un poison pour la diplomatie d’ATT
La multiplication des opérations menées par les salafistes d’Al-Qaïda au Maghreb islamique (Aqmi) dans le Nord embarrasse ATT et pollue la fin de son mandat.
Mali : en route pour 2012
À ceux qui, d’Alger à Paris, en passant par Nouakchott, Londres ou Washington, reprochent à son pays d’être « le maillon faible de la lutte antiterroriste au Sahel », le président Amadou Toumani Touré (ATT) répond, avec une pointe d’humour : « Pour qu’il y ait un maillon faible, il faudrait qu’il y ait une chaîne. Or celle-ci n’a jamais existé malgré toutes nos tentatives pour créer un mécanisme régional. »
À tort ou à raison, la présence des djihadistes d’Al-Qaïda au Maghreb islamique (Aqmi) dans le nord du Mali fait passer des nuits blanches au palais de Koulouba et entame sérieusement le capital sympathie dont jouit le pays.
La première manifestation des salafistes dans le septentrion malien a eu lieu en 2003, quand un groupe terroriste appartenant au Groupe salafiste pour la prédication et le combat (GSPC, ancêtre d’Aqmi) s’y était réfugié après avoir kidnappé une trentaine de touristes allemands, autrichiens et suisses dans le Sud algérien. Sollicité par Berlin, Vienne et Berne, ATT s’était engagé dans une médiation avec les ravisseurs. Avec succès, puisqu’elle a abouti à la libération des otages. Cependant, le paiement d’une rançon lui a valu bien des déboires, notamment avec le voisin du nord : l’Algérie.
Depuis, le scénario s’est plusieurs fois répété et, à chaque rapt, ATT affiche sa disponibilité, « pour des raisons humanitaires », à sauver la vie des otages. Accusé de laxisme, voire de complicité, en septembre 2007, il demande à ses pairs de la région de se réunir en sommet pour sauver le Sahel.
Lutte sans merci
Trois ans après, la rencontre n’a toujours pas pu se tenir. Officiellement à cause des calendriers des chefs d’État, officieusement pour des raisons d’ego surdimensionnés, de douteuses volontés de leadership régional et de suspicions entre partenaires.
Selon ATT, « si Aqmi est dans le Sahel, c’est parce que nous n’y sommes pas ». Son « nous » n’est ni royal ni académique, mais est celui d’une présence militaire conjointe des forces de sécurité des pays de la sous-région, des patrouilles mixtes le long des frontières (avec l’Algérie, le Niger et la Mauritanie), là où elles sont le plus sensibles. « S’ils me reprochent mon laxisme, qu’est-ce qui les empêche de tenir le sommet pour me le dire de vive voix ? s’étrangle-t-il en parlant de ses voisins. Quant au lieu de la réunion, il m’importe peu que cela soit à Bamako, Alger, Tripoli ou Niamey, pourvu que l’on mette tous les problèmes sur la table. »
La multiplication des prises d’otages embarrasse ATT et pollue la fin de son deuxième et dernier mandat. « Ce n’est pas une poignée d’illuminés, de brigands et de trafiquants qui pourra occulter tout ce qui a été entrepris dans mon pays. Il est vrai que le nombre de touristes qui viennent visiter le pays Dogon, la mosquée de Djenné ou la ville sacrée de Tombouctou pourrait baisser, mais, en aucune manière, l’image du Mali ne sera ternie. Les salafistes d’Aqmi ne pourront jamais y essaimer leur doctrine criminelle. »
Contrairement à sa gestion de la rébellion touarègue (au grand dam de la classe politique malienne, en 2006, il avait prôné le dialogue au détriment d’une solution exclusivement militaire), le président malien préconise une lutte sans merci contre les djihadistes.
« Il se trouve que, tout seul, je n’en ai pas les moyens [les effectifs de son armée se situent autour de 20 000 hommes, sous-équipés, NDLR]. D’où mes appels répétés pour une Conférence régionale dédiée à la sécurité du Sahel. Quant à ceux qui parlent de notre complicité avec les criminels, que Dieu leur pardonne. Ils insultent la mémoire de nos hommes tombés sous les balles des salafistes », dit-il, amer, en pensant à la trentaine de soldats et officiers maliens tués lors d’accrochages avec les djihadistes. Pour ATT et sa diplomatie, Aqmi est un véritable poison.
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