L’ère du soupçon
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Jean-Michel Aubriet
Ancien rédacteur en chef de la rubrique Europe-Amérique-Asie de Jeune Afrique.
Publié le 18 octobre 2010 Lecture : 1 minute.
Dans le cadre de la discussion du nouveau projet de loi sur l’immigration, l’Assemblée nationale française a, le 5 octobre, adopté une disposition pénalisant le « mariage gris », sorte d’escroquerie sentimentale permettant à un étranger de s’unir à un autochtone, souvent plus âgé, dans le seul but d’acquérir la nationalité française et les avantages afférents, puis, l’opération menée à bien – si l’on peut dire –, de s’en séparer sans ménagements excessifs.
Ce genre d’affaire existe, c’est entendu, et mérite d’être sanctionné. Mais la peine de sept ans d’emprisonnement et 30 000 euros d’amende votée par les députés à l’instigation du ministre Éric Besson paraît quand même extravagante. On aimerait que certains délits financiers, par exemple, soient aussi durement réprimés. Et puis, comment établir avec certitude la réalité de la tromperie ? Éric Besson – qui vient lui-même d’épouser une jeune Tunisienne – prétend-il sonder les reins et les cœurs ? « Vous voulez mettre en place une police des sentiments », s’est indigné le député écologiste Noël Mamère. S’il suffit désormais qu’un mariage entre un Français et un étranger soit rompu pour que le moins gaulois des deux se trouve ipso facto exposé à de lourdes sanctions pénales, l’atmosphère va vite devenir irrespirable. C’est l’ère du soupçon.
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