L’affaire Ould Sidi Mouloud : suite et fin ?

L’ex-inspecteur général de la police du Polisario devrait être relâché par ses anciens camarades qui l’avaient arrêté le 21 septembre. Le motif de sa détention ? Être un partisan déclaré du plan proposé par le Maroc pour régler la question sahraouie. Retour sur une affaire embarrassante pour Alger.

Ould Sidi Mouloud soutient le plan d’autonomie marocain pour le Sahara occidental. © D.R.

Ould Sidi Mouloud soutient le plan d’autonomie marocain pour le Sahara occidental. © D.R.

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Publié le 7 octobre 2010 Lecture : 3 minutes.

Mercredi 6 octobre, l’annonce de la libération prochaine de Mustapha Salma Ould Sidi Mouloud a été saluée par le Maroc. Aucune date n’a été annoncée pour cet élargissement et l’ex-inspecteur général de la police du Polisario ne s’est donc pas encore exprimé sur les conditions de sa détention arbitraire, voulue par ses anciens frères d’armes.

Quoi qu’il en soit, le Polisario l’avait prévenu. Dans la nuit du 21 au 22 septembre, les forces du Front ont mis leur menace à exécution et ont arrêté Ould Sidi Mouloud, à Mehriz (Algérie), en « territoires libérés ». Accusé de trahison et d’espionnage, il avait ensuite été incarcéré dans un lieu tenu secret. Son frère et sa femme ont été informés oralement qu’il devrait être traduit devant un tribunal militaire au début du mois d’octobre. Pour l’instant, aucune information sur cette procédure n’a filtré.

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L’ancien policier est dans le collimateur du Polisario depuis qu’il a annoncé publiquement, le 9 août, son intention de défendre à l’intérieur des camps la proposition d’autonomie prônée par le Maroc depuis 2007. Malgré les menaces dont il était l’objet, il n’a pas renoncé à rejoindre Tindouf, où vivent sa mère, sa femme et ses quatre enfants. Joint par Jeune Afrique la veille de son arrestation, Ould Sidi Mouloud ne se faisait guère d’illusions : « Je sais ce que je risque. Mais toute ma vie est dans les camps et j’y retournerai, coûte que coûte. »

Un rallié pas comme les autres

Pour les dirigeants du Front, la situation est plus qu’embarrassante. Membre de la grande tribu des Reguibat Labeihat, Mustapha Ould Sidi Mouloud est un personnage influent qui a occupé des postes stratégiques. Surtout, l’ancien policier n’est pas un rallié comme les autres. « Je ne suis ni marocain ni algérien, mais un ­Sahraoui indépendant qui réclame le droit de défendre une opinion personnelle, expliquait-il le 19 septembre. L’indépendance n’est pas une solution réaliste. Si je défends l’autonomie, c’est pour le bien de mon peuple et l’avenir de mes enfants. » Celui qui pouvait passer au début de son périple pour un hurluberlu isolé et suicidaire s’est révélé un homme capable de bravoure, prêt à se sacrifier pour des idées.

Le geste d’Ould Sidi Mouloud jette aussi un confondant coup de projecteur sur l’état des libertés dans les camps. « Là-bas, déplorait-il, c’est un seul parti, une seule opinion. On ne peut ni circuler ni s’exprimer librement. » Les autorités marocaines s’empressent d’ailleurs de rappeler que lors de l’affaire Aminatou Haidar, en décembre 2009, la militante indépendantiste avait été expulsée du royaume mais jamais arrêtée. Elle vit aujourd’hui à Laayoune, où elle n’est pas inquiétée.

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Depuis l’arrestation d’Ould Sidi Mouloud, la mobilisation internationale n’avait cessé de grandir. De la France aux États-Unis, en passant par l’Espagne, des comités de soutien proches du Maroc ont été créés. Amnesty International, Human Rights Watch, la Croix-Rouge ou le Haut-Commissariat pour les réfugiés réclamaient la libération d’un homme dont le seul crime serait d’avoir voulu exprimer une opinion dissidente. À ­Paris, le ministère des Affaires étrangères disait suivre l’affaire « avec attention », et des membres du Congrès américain avaient envoyé une lettre à Hillary Clinton, dans laquelle ils appellaient le département d’État à œuvrer pour la libération d’Ould Sidi Mouloud.

Alger pointé du doigt

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Dans cette histoire, c’est aussi l’Algérie qui était pointée du doigt par les autorités marocaines. « Notre voisin ne peut pas se défausser, s’insurgeait Khalid Naciri, ministre de la Communication. Ould Sidi Mouloud a été arrêté en Algérie. Soit l’Algérie exerce la souveraineté sur son territoire et elle doit garantir la liberté d’expression, soit elle doit reconnaître qu’elle a cédé une partie de sa souveraineté à une république fantoche. » Réponse des Algériens : Rabat profite d’un cas isolé et manipulé pour mener, une fois de plus, une campagne politico-médiatique contre Alger.

À l’heure où les négociations sur le Sahara occidental sont dans l’impasse, l’affaire Ould Sidi Mouloud a en tout cas constitué une aubaine pour le Maroc. C’est en effet la première fois qu’un Sahraoui des camps de réfugiés se dit prêt à se battre pour l’autonomie. Si l’indépendantiste Aminatou Haidar passe pour la « Gandhi du désert », Ould Sidi Mouloud apparaît, lui, comme le premier héros de l’autonomie.

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