Les Tunisiennes vues par leurs hommes

Le statut et les droits acquis par la gent féminine ne sont pas toujours une évidence pour l’autre moitié du pays : les hommes. S’ils sont intarissables sur le sujet, qu’en pensent-ils vraiment ?

Certains Tunisiens trouvent leurs femmes « belles, admirables…et terribles ». © D.R.

Certains Tunisiens trouvent leurs femmes « belles, admirables…et terribles ». © D.R.

Publié le 5 octobre 2010 Lecture : 2 minutes.

Tunisie : où (en) sont les femmes ?
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Tunisie : où (en) sont les femmes ?

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« Ah, les femmes de mon pays ! Elles sont belles, admirables… et terribles, s’exclame Mourad, chef d’entreprise dont le personnel est très majoritairement féminin. Elles ont de l’ambition et se donnent les moyens de réussir. Elles impressionnent par le travail qu’elles sont capables d’accomplir, mais, parfois, leur détermination fait peur. »

Ce sentiment est partagé par Nizar, un professeur tunisois de 38 ans, qui en est à son deuxième divorce : « Elles ont tellement soif de se réaliser qu’elles transposent aussi dans la sphère privée leur souci de réussir. Vivre des défis permanents au sein d’un couple est éreintant. Et elles ont la loi pour elles… Il faudra bientôt se pencher sur la condition masculine ! »

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Nizar considère que les divorces (9 130 en 2008, contre 16 000 mariages) sont dus aux divergences sur les objectifs à réaliser en commun. « Les femmes ont mis la barre très haut et elles ont été plus vite que nous, nuance son collègue Fethi. Quand elles entreprennent, dans quelque domaine que ce soit, elles excellent et donnent ainsi le sentiment que l’homme est inutile. L’erreur vient de nous, car nous nous sommes complu à croire que notre position de mâle dominant était inaliénable, alors que les mutations sociales ont changé tous les repères. »

Si la réussite professionnelle des femmes est pleinement reconnue par leurs challengers masculins, ils sont plus gênés aux entournures quand il s’agit du couple et de la famille. « En fait, ajoute Fethi avec une pointe d’ironie, nous avons été élevés par nos mères, des femmes pour lesquelles nous étions les enfants rois, et nous voudrions qu’il en soit de même dans nos couples. De par leurs multiples champs d’intervention et le fait que ce sont elles qui enfantent, les femmes nous font nous sentir bien petits ! » 

Plus influençables qu’avant

Plus que l’analyse de leurs rapports aux femmes, d’autres trouvent plus pertinent de s’attarder sur le fait que chaque génération a engendré un type de femme différent. « Certaines sont de vraies amazones et d’autres totalement soumises. De quelles femmes parlons-nous ?, s’interroge le cinéaste Walid Tayaa. Les plus jeunes sont dans une perpétuelle contradiction. Elles veulent à la fois vivre à l’occidentale et se conformer à la tradition. Contrairement à leurs aînées, les moins de 30 ans se cherchent, n’ont pas de réel projet de vie et cèdent de plus en plus à la pression sociale. C’est dommage car les générations précédentes étaient plus cohérentes, il aurait fallu ne pas perdre de vue cette touche particulière de l’identité tunisienne. Beaucoup trop de femmes se sont affublées d’une image et d’une pensée véhiculées par les télévisions arabes satellitaires et ont ainsi fait le jeu d’hommes qui réfutent les avancées. »

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Les hommes tunisiens reconnaissent sans aucun doute à cette « autre moitié de l’humanité », comme la qualifiait Condorcet, d’avoir métabolisé l’évolution sociale et, dans le même temps, se sentent contraints de définir, à leur tour, leur propre place dans la société. « Homme-femme, c’est un éternel jeu de rôle. Un équilibre vital mais ténu, que nous devons avoir la vigilance de préserver », conclut Mohamed, un diplomate à la retraite.

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