Bandits ou rebelles ?
Inquiétudes, à Bujumbura, au Burundi, après le meurtre de plus de dix personnes, mi-septembre. L’identité des tueurs fait débat.
Depuis le boycott, en mai, de l’élection présidentielle par les partis de l’opposition et la contestation des résultats des communales qui l’avaient précédée, la tension n’a pas baissé au Burundi. Elle s’est même accentuée avec la fuite de la plupart des dirigeants de l’opposition (dont celle d’Agathon Rwasa, chef des Forces nationales de libération) et le harcèlement dont leurs partisans se disent victimes. Courant septembre, une dizaine de corps, dont certains mutilés, ont été découverts dans la région de Rukoko, au nord-ouest de la capitale, Bujumbura. Pour le pouvoir, ces tueries sont l’œuvre de « bandits armés ». Ce qui ne convainc pas tout le monde, à l’instar de ce fonctionnaire international qui a requis l’anonymat : « C’est plus que du banditisme et c’est très préoccupant », confie-t-il.
Les habitants de Bujumbura Rural y voient la marque d’une nouvelle rébellion. Un dissident du Conseil national pour la défense de la démocratie-Forces de défense de la démocratie (CNDD-FDD, au pouvoir) l’admet à mots couverts : « Il y a des similitudes avec 1993 : un soulèvement populaire réprimé, un malaise social, et, enfin, une rébellion. En 2010, il s’agit d’élections contestées, de leaders politiques qui ont choisi l’exil, d’opposants emprisonnés, d’une insécurité grandissante. Est-ce une rébellion ? Peut-être. Mais il n’y a pas encore de revendication dans ce sens, ni de nom de mouvement. »
Du côté des militaires, on se veut rassurant, alors même que les désertions seraient de plus en plus nombreuses. Pour le général Diomède Ndegeya, chef d’état-major adjoint de l’armée burundaise, la situation actuelle n’est pas alarmante. « Nous sortons d’une période électorale où certains n’ont pas digéré leur échec, affirme-t-il. Au lieu de consolider leur position, ils font preuve d’un manque de réalisme et de maturité politique en s’éparpillant dans la nature. » À l’en croire, ceux qui quittent l’armée sont les militaires de retour de Somalie et qui avaient déjà souhaité revenir à la vie civile avant de partir. « Là-bas, ils touchaient 650 dollars par mois. Ce qui leur a rapporté une petite cagnotte au bout d’un an. Ils préfèrent se lancer dans le commerce », souligne le général Ndegeya. D’après lui, le fait que Rwasa soit entré dans la clandestinité n’a rien d’inquiétant. « Pour quelle nouvelle cause va-t-il se battre et qui est prêt à le suivre ? » se demande-t-il.
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