Les tueurs sont lâchés
Cinq marines sont accusés par la justice américaine d’avoir, de manière gratuite, assassiné des civils dans la région de Kandahar. Ils risquent très, très gros.
Full Metal Jacket. Dans ce film de 1987, le réalisateur américain Stanley Kubrick dépeint la folie meurtrière d’un groupe de marines. Mais il arrive que la réalité soit pire que le cinéma. Cinq soldats américains sont aujourd’hui accusés d’avoir participé au meurtre – totalement gratuit – de trois civils afghans. Et sept autres d’avoir couvert les agissements de leurs collègues. Un tribunal militaire étudie actuellement les charges qui pèsent sur eux afin de déterminer s’ils sont passibles de la cour martiale.
Novembre 2009. Le sergent-chef Calvin Gibbs rejoint la 5e brigade Stryker, 2e division d’infanterie, sur la base opérationnelle de Ramrod, à l’ouest de Kandahar. Gibbs est originaire de Billings, dans le Montana. Il a 25 ans et c’est un ancien d’Irak. En décembre, il se vante auprès de ses camarades : rien de plus facile que de balancer une grenade sur des civils. Ses camarades ont-ils ri ? La 5e brigade Stryker a bien besoin de se détendre. Depuis juillet 2009, trente-deux de ses membres ont été tués – dont sept lors d’une attaque à la bombe, au bord d’une route. Alors, on fume du haschich, on boit de l’alcool de contrebande…
Le gradé de la bande
D’après les enquêteurs, ce serait sous l’influence de Gibbs, le plus gradé de la bande, que le projet de former une « kill team » aurait vu le jour. En janvier dernier, une patrouille fait irruption dans le village de La Mohammed Kalay. Gibbs, Jeremy Morlock (22 ans) et Andrew Holmes (19 ans) se postent près d’un champ de pavot. Quand Gul Mudin apparaît, Gibbs tend une grenade à Morlock, qui la dégoupille et la lance sur l’Afghan. Les Américains plongent à couvert. Holmes ouvre le feu.
La deuxième victime se nomme Marach Agha. Le 22 février, Gibbs l’abat et place près de son cadavre un kalachnikov afin de le faire passer pour un taliban. La troisième, en mai, sera Mullah Adadhad, tué par balle et à l’aide d’une grenade…
Au total, les 12 soldats impliqués doivent répondre de 76 chefs d’accusation. Détail sordide : Gibbs aurait conservé quelques souvenirs de ses forfaits. Des doigts, des dents, des crânes… S’ils sont reconnus coupables, les accusés risquent la peine de mort ou la prison à perpétuité. Pour l’heure, ils nient tout en bloc. Les familles de certains d’entre eux, comme celles de Jeremy Morlock et de Michael Wagnon, ont même créé des sites internet pour les aider à financer leur défense. Mais les langues devraient bien vite se délier.
Si les meurtres sont aujourd’hui connus, c’est parce qu’un soldat de la 5e brigade Stryker a été sévèrement battu, en mai, après avoir dénoncé ses camarades pour consommation de haschich. Les enquêteurs de l’armée ont alors découvert que le problème était d’une tout autre envergure…
Sous la contrainte
Le pire est que le drame aurait pu être évité. En février 2009, le soldat Adam Winfield contacte son père par internet et lui demande d’intervenir auprès de sa hiérarchie : son unité vient de tuer un civil afghan et prémédite d’autres meurtres. Winfield père prend donc contact avec l’armée, laisse plusieurs messages sur un répondeur et finit par parler pendant douze minutes avec un responsable de la base Lewis-McChord, dans l’État de Washington, siège de la 5e brigade Stryker. Réponse : impossible de rien faire « tant qu’Adam n’est pas de retour à Fort Lewis ». Winfield est accusé d’avoir participé au dernier meurtre. Selon son avocat, il y aurait été contraint par Gibbs et aurait volontairement manqué sa cible. Trois soldats ont d’ores et déjà confessé que le sergent-chef avait menacé Winfield de mort. L’action de Full Metal Jacket se déroulait au Vietnam…
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