Le voyage en enfer de Tina Okpara

Tina Okpara a été séquestrée et maltraitée par « son père adoptif », l’ancien joueur nigérian du Paris-Saint-Germain Godwin Okpara, auquel elle avait été « confiée » par ses parents. Elle raconte sa triste expérience dans un livre, pour que « tous les Africains sachent ce qui peut arriver quand on confie son enfant à quelqu’un ».

Détail de la couverture de son livre « Ma vie a un prix. Esclave en France au XXIe siècle », des éd © DR

Détail de la couverture de son livre « Ma vie a un prix. Esclave en France au XXIe siècle », des éd © DR

Publié le 26 septembre 2010 Lecture : 2 minutes.

« À deux reprises elle pose la lame tranchante sur mon sexe et à deux reprises elle trace un sillon profond. Le sang gicle, coule sur mes jambes. […] Je ne veux pas voir de sang sur ma moquette, me dit-elle. Nettoie tout ça ! » Ce n’est pas de la fiction. Cela se passe dans la vraie vie. Celle de Tina Okpara, battue et torturée pendant cinq ans par ses parents adoptifs : le footballeur international nigérian Godwin Okpara et son épouse, Linda. Incarcérés en France, l’ex-défenseur du Paris-Saint-Germain (1999-2001) et sa femme purgent respectivement une peine de dix ans et de quinze ans de prison. Tina, elle, sort un livre, Ma vie a un prix. Esclave en France au XXIe siècle (éditions Michel Lafon), pour « vider son cœur » de toute la douleur.

« Malgré ce qu’elle a vécu, elle est lumineuse, témoigne le journaliste Cyril Guinet, coauteur et ami de Tina. C’est la jeune femme la plus enjouée et la plus courageuse qui soit. » Et il en faut du courage pour subir sans broncher la faim, les coups, les injures, lorsqu’on a 12 ans, âge auquel Tina est entrée dans la famille Okpara.

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Sauvagement mutilée

En 2001, persuadé de lui « offrir un avenir meilleur », son père naturel la « confie » au footballeur et à son épouse en échange de 30 000 nairas (l’équivalent de 375 euros d’aujourd’hui). La petite Nigériane qui rêvait d’école et de devenir infirmière sera la « bonne à tout faire » de Linda Okpara, s’échinant dès l’aube à laver, repasser, récurer. Elle ne se doutait pas qu’elle coucherait sur un matelas miteux posé à même le sol d’une cave humide. Encore moins qu’elle subirait les assauts répétés de son « père », ce qui lui vaudra d’être sauvagement mutilée par sa « mère ». En 2005, « morte pour morte, fichue pour fichue », Tina quitte la maison. Terrifiée à l’idée d’être ramenée par la police, comme lors de sa première tentative d’évasion. Cette fois sera la bonne : les Okpara seront arrêtés, jugés et condamnés en 2007.

À 22 ans, Tina tente de se reconstruire. De reprendre confiance en elle et dans les autres. Ce livre, c’est un peu sa thérapie. « Replonger dans ces souvenirs a été très difficile : j’en ai fait des cauchemars, des crises d’angoisse. J’en ai tellement pleuré que je pensais ne plus m’arrêter. Mais il fallait que ça sorte, pour que tous les Africains sachent ce qui peut arriver quand on confie son enfant à quelqu’un, explique la jeune femme. Je ne peux pas effacer ce que j’ai vécu. Mais je veux aller de l’avant. » Tina a mis toutes les chances de son côté : elle a fait la paix avec Sophie Okpara, la fille de ses bourreaux. Depuis 2006, elle est auxiliaire de vie en gériatrie et travaille en région parisienne. Tout en espérant, dit-elle, rencontrer un « homme qui m’aimera telle que je suis »… et récupérer son véritable patronyme : Omaku.

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