Mohamed Khlie : objectif TGV
Le patron du rail marocain entend être celui par qui le TGV arrivera en Afrique. Une région qu’il préside désormais au sein de l’Union internationale des chemins de fer.
En choisissant Mohamed Rabie Khlie pour présider la région Afrique, les dirigeants de l’Union internationale des chemins de fer (UIC) ont promu, le 29 juillet à Tripoli, un ambassadeur inlassable de leur cause. Le fait que l’Office national des chemins de fer (ONCF) marocain soit le premier à lancer un TGV sur le continent (prévu pour 2015) a joué en sa faveur, mais ses qualités de lobbyiste, proche du Français Guillaume Pepy (président de la SNCF) et du Tunisien Mohamed Najib Fitouri (SNCFT), sont aussi à l’origine de son élection. « Son nom s’est imposé naturellement. Il a été plébiscité pour son caractère de battant et ses qualités d’orateur », explique Jean-Pierre Lehman, coordinateur Afrique à l’UIC.
Tangérois, Mohamed Khlie est un pur produit de l’ONCF, où il a effectué toute sa carrière depuis sa sortie en 1987 de l’école d’ingénieurs Mohammadia. « Bosseur, il a vite gravi les échelons. Sitôt entré à l’ONCF, il a passé avec succès le concours d’inspecteur d’exploitation, un poste qui l’a amené à être en contact avec tous les métiers de l’entreprise », indique sa proche collaboratrice Najiba Tarachte. À 47 ans, Mohamed Khlie n’a pas chômé : responsable régional de la zone de Kénitra en 1988, il prend ensuite la direction du secteur commercial en 1996 puis celle de l’exploitation en 1999. « C’est le hasard qui m’a fait entrer dans le rail, explique l’intéressé. En tant qu’ingénieur, j’avais la possibilité de faire mon service civil dans une entreprise publique et j’ai atterri à l’ONCF. Et puis j’ai été happé par l’esprit cheminot… »
Un gestionnaire rigoureux
« Il faisait partie d’une promotion d’ingénieurs embauchés au même moment et appréciés pour leur proximité avec le personnel. Parmi eux, ses deux lieutenants, Mohamed Smouni, directeur infrastructure et circulation, et Ali El Kerram, directeur de la maintenance, l’ont accompagné tout au long de sa carrière », raconte Mohamed Ouhnaoui, de l’Union marocaine des travailleurs, qui l’a côtoyé à ses débuts.
« À son entrée à l’ONCF, il jugeait l’entreprise mal gérée. Jeune ingénieur très croyant, il était surnommé par ses collègues “le fils du fqih” [« maître d’école coranique », au Maroc, NDLR] et prêtait attention aux questions éthiques et sociales. Mais quand il a été promu directeur, il a appliqué sans état d’âme les politiques de rigueur qui, dans les années 1990, ont fait passer le nombre de salariés de 14 000 à 8 000 », regrette le syndicaliste. Mohamed Khlie acquiert une réputation de bon gestionnaire et de bon communicant, si bien qu’au départ de l’ancien patron, Karim Ghellab, on lui confie l’intérim du poste, avant de le nommer officiellement directeur général de l’ONCF, en 2004.
« M6 » lui fait confiance
Son credo : rendre le réseau pérenne économiquement en augmentant le trafic. Pour cela, il améliore considérablement la maintenance, optimise le réseau existant, rénove 40 gares et lance la construction de deux nouveaux tronçons, l’un de 117 km vers Nador, l’autre vers le port de Tanger Med. Résultat : de 15 millions en 2005, le nombre de passagers est passé à 30 millions aujourd’hui.
Ce succès lui vaut un soutien financier sans faille de l’État : plus de 3 milliards d’euros lui ont été accordés pour le plan quinquennal 2010-2015. Une jolie enveloppe qui lui permettra notamment de lancer son « bébé », ce fameux TGV qui doit mettre Casablanca a seulement deux heures et dix minutes de Tanger et qu’il promeut sans relâche. « En 2015, le Marocain moyen prendra le TGV », promet-il. Avantage non négligeable, Mohamed Khlie bénéficie de la confiance de Mohammed VI, ardent défenseur du TGV, mais aussi de son ancien patron Karim Ghellab, aujourd’hui ministre des Transports.
En dehors de l’ONCF, Mohamed Khlie déploie son énergie à relancer l’association des ingénieurs de l’école Mohammadia. Amateur de la Liga espagnole, il ne dédaigne pas chausser les crampons. « Il apprécie aussi la poésie arabe », indique son ami et condisciple d’école Abdelouahed Jambari. Une passion qui devrait l’aider à se ressourcer devant les obstacles qui ne manqueront pas de surgir sur le chemin de la grande vitesse. Seul le terrassement des voies a pour le moment débuté. Mohamed Khlie devra se montrer intraitable sur la qualité, les coûts et les délais
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