Attention, blonde méchante !
De sa Russie natale à la Knesset, le parcours d’Anastasia Michaeli est un exemple de réussite. Mais depuis qu’elle s’est lancée en politique, cet ex-mannequin offre une image nettement moins séduisante.
Jamais le Parlement israélien n’avait connu une telle foire d’empoigne. Ce 2 juin, alors qu’ils s’étaient réunis en séance plénière pour évoquer le sanglant abordage de la flottille humanitaire au large de Gaza, les députés de la Knesset ont offert une piètre image. Pour avoir pris place à bord du ferry turc Mavi Marmara, la députée arabe israélienne Hanine Zoabi était attendue de pied ferme. Appelée à livrer sa version des faits, elle fit son apparition à la tribune sous les huées de l’hémicycle, avant de se voir couvrir d’insultes et de menaces à l’entame de son discours.
Parmi les députés les plus en verve, Anastasia Michaeli, membre du parti d’extrême droite Israël Beitenou. « Pourquoi laisse-t-on cette femme prendre la parole ? » s’écria-t-elle en se ruant sur Zoabi. Des agents de sécurité durent intervenir pour l’empêcher d’en venir aux mains, provoquant une mêlée générale. Évacuée de force, Michaeli eut tout juste le temps de brandir un passeport iranien en direction de la députée arabe israélienne : « Prenez-le, ça vous servira certainement dans vos tournées d’incitation à la haine, d’autant que votre passeport israélien sera révoqué ce soir. »
Comble de l’ironie, alors que Zoabi n’a jamais quitté sa Galilée natale, la voilà menacée d’être déchue de sa nationalité par une immigrante. Car Michaeli, 35 ans, n’est installée en Israël que depuis 1997, comme le rappelle son fort accent. Avec son physique de femme fatale, la « blonde incendiaire », telle que l’a surnommée le quotidien Haaretz, aurait tout aussi pu être une espionne de choc du KGB. Née à Leningrad, elle grandit dans une modeste famille chrétienne, soumise à une éducation stricte. À 20 ans, elle décroche une licence d’ingénieur en électronique. Élue Miss Saint-Pétersbourg, elle en profite pour se lancer dans la carrière de mannequin. Elle passe un an à Paris, où elle participe à plusieurs campagnes de prêt-à-porter pour Nina Ricci et Schwarzkopf. À son retour, elle rencontre Joseph Samuelson, un jeune juif de Riga, qui devient l’homme de sa vie.
Une convertie de fraîche date
Le couple décide de s’installer en Israël. Prise d’une passion soudaine pour la Torah, Anastasia Michaelevski, de son vrai nom, entreprend de se convertir au judaïsme. Entre-temps, quelques concours de beauté suffisent à attirer l’attention de Channel 9, la télévision russophone israélienne, qui l’engage comme présentatrice. La jeune femme crève l’écran et devient rapidement une icône de la communauté russe. Sa notoriété lui offre un nouveau tremplin : la politique.
En 2006, le président Shimon Pérès la persuade de rejoindre les rangs de Kadima. Reléguée en 44e position sur la liste du parti centriste, elle ne sera pas élue. Déçue mais ambitieuse, c’est avec le très controversé Avigdor Lieberman que Michaeli choisit de poursuivre sa route. « Je l’ai suivi depuis ses débuts et j’ai beaucoup appris à ses côtés, raconte-t-elle. C’est un leader et un vrai sioniste. Il apporte énormément au pays. » Sa volte-face est payante. Lors du scrutin législatif de février 2009, Israël Beitenou obtient quinze sièges. Et Michaeli signe son entrée officielle dans la vie politique.
Dès lors, la jeune députée fixe ses priorités : « Mon objectif est de représenter la communauté russe, mais aussi les femmes. » Et de poursuivre : « L’éducation des enfants est la principale tâche de ce pays, mais nous devons avancer. » Michaeli applique ce credo à la lettre, comme en témoigne l’état de son bureau, où les jouets de sa progéniture s’entassent au milieu de ses dossiers de travail. Mère de huit enfants, hyperactive, elle collabore auprès de quatorze commissions parlementaires.
Mais derrière son image de femme émancipée, ce sont des positions nationalistes qui caractérisent son engagement. Le parti qu’elle représente place la question de la loyauté des Arabes israéliens au cœur de son programme. En 2007, Michaeli avait été ouvertement accusée de racisme après s’être étonnée qu’une chanteuse au teint basané – Liel – puisse représenter l’État juif au concours de l’Eurovision. Son accrochage avec Zoabi n’est donc pas tout à fait le fruit du hasard.
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